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 Fragment #7 - Scènes coupées : La vérité si je crève

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Sélène

Sélène



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MessageSujet: Fragment #7 - Scènes coupées : La vérité si je crève   Fragment #7 - Scènes coupées : La vérité si je crève Empty09.04.08 21:37

Jeudi 10 mai 2007
à Paris

J'entends revenir les notes de piano d'Eternal Sunshine of the Spotless Mind. Tout autour de moi s'est figé. L'agitation s'arrête à ma sphère intime, je suis dans une bulle. Et j'observe les gens en blanc farfouiller, grenouiller. Il y a trois spots au dessus, des carreaux de boucher aux murs. Des moniteurs exhibant des courbes dansant la gigue, et une panique ambiante à laquelle je suis étranger. Flash. Deux hommes pénètrent dans la pièce. Tenue noire stricte pour l'un. On le dirait sorti d'un film. Cravate noire, bruns, rasé de prêt, chemise blanche et des lunettes fumées qui m'obsèdent. Je ne vois pas son regard et je n'aime pas ça. Il reste debout tandis que l'autre s'assoit en face de moi. Lui aussi a des lunettes. Mais rondes, montées de verre en plastique, et serrées sur la tête avec des lanières de cuir. Il porte une sorte de treillis kaki verdâtre, de la poussière sur sa moustache et une gueule de débile mentale. Option coupe de cheveux blancs-gris ébouriffée du savant fou.
« Monsieur Nathan-Paul Durand.
- Ouais !
- Ce n'était pas une question, dit-il en parcourant les yeux baissés un dossier.
- Ah bon. Cool.
- Connaissez-vous la raison de votre présence ici ? demande-t-il didactiquement. Visiblement, il ne peut pas s'empêcher de rouler sa moustache celui-ci.
- Non, mais j'aimerai bien savoir où vous planquez la machine à café.
- Ah ! Oui monsieur Nathan, vos "addictions". Toujours le nez dans vos "addictions"... Reprenons. Age 29 ans, domicilié au Kremlin-Bicêtre en région parisienne. De profession assistant rédactionnel pour un magasine. Actif dans le milieu de l'événementiel. Oui la musique, monsieur Nathan, toujours la musique. Vous avez aussi comme passions aussi le whisky, la drogue et les femmes. Permettez-moi un léger sourire face à ce cliché bien rodé.
- Et moi j'vous emmerde mouchtar déglingué ! Les femmes, c'est fini depuis longtemps ! Et puis j'touche plus à rien, je me défonce plus. »
Consultant une montre à gousset :
« J'aimerais me chamailler avec vous à loisir, échanger et rétorquer à vos ironies et à votre verbe. Vraiment avec plaisir. Mais le temps nous manque. Vous êtes là pour qu'on détermine dans quel tas d'ordure on va vous parquer. Pour cela j'ai besoin de vous jauger, vous et votre vie, face à moi.
- Ouais et moi j'ai besoin..
- Etes-vous quelqu'un de bon, monsieur Nathan ?
- ... Hum ! Non.
- Etes-vous quelqu'un de confiance ?
- Vaguement.
- Que pensent les gens de vous ? »
Il me pose des questions et me balance mes soi-disant vérités. Je me déconnecte et regarde autour de moi. La pièce est plus claire mais toujours aussi vide. Le plafonnier se reflète dans la glace à droite. Je l'y observe à l'envers ; il a des bottes en cuir et son truc qui ressemble à une tenue de guérilleros incrustée de plaques de métal rouillées. Oranges-rouillées. Et sa tête ronde. Il a des joues assorties d'un rictus débordant de bonhomie. Et voilà qu'il me déblatère un bilan en couleur de mes trente ans de vie. Je suis fatigué... Si tu m'entends je suis fragile et épuisé. Sors-moi de là. Mais non ! Voilà qu'il me parle et me reparle. Il en accoucherait presque sa mère.
« Qu'avez vous ressenti au décès de vos parents ? Lavez-vous votre linge régulièrement ? Regardez-vous Arte ? »
Sa voie se fait fuyante, grésillant, comme une sorte de bande FM. Clac. Il claque des doigts.
« Etes-vous parmi nous ? En réalité, j'ai déjà l'essentiel des réponses dans ce dossier, vous savez. Il n'y a que la repentance et l'honnêteté qui vous ouvriront les portes de notre villégiature.
- Si vous le dites. De toute façon, je suis mort. Qu'est ce que j'en ai à foutre. J'ai sans doute pas assez rempli ma vie. Pas assez voyagé. Jérusalem Dakar... et pour ce que ça m'a dégoûté...
- Ça vous a dégoûté et ça vous a ouvert l'esprit dans le même temps. Sur vous, et sur ce "vous" inscrit dans ce monde. Ça a été la suite logique de votre faille, monsieur Nathan. Sorti d'un petit monde de déchéance centré sur vous même, vous avez pris la pilule bleue. Ce que vous avez découvert vous ensevelit irrémédiablement sous terre. Vous payez le prix de votre sensibilité.
- Arrêtez, je vais verser une larme... Ouais même que je crois que certains me manqueraient presque... tiens.
- Et que sont devenus Cécilia... et Mel ? Et, m'a-t-on dit, ces gens avec qui vous avez beaucoup échangé... en France et à l'étranger. Dites-moi, monsieur Nathan, dites-moi plutôt ce que nous ne savons pas. Qui sont ces gens à qui vous écrivez sporadiquement ? Nous en avons quelques traces, des Lola, des Julian, Jed et Léopold, des Alexandre... Sylvia aussi est indiquée ici.
- Je connais pas de Sylvia. Et puis, démerdez-vous. Je ne sais pas ce que vous me voulez, ni où je suis, et je commence à avoir mal au crane !
- Vous êtes trop nerveux, trop... hystérique. Vous êtes en pleine fuite en avant. Vous confondez réel et fantasme. Drame de l'idéaliste blasé doublé du lâche.
- Ouais, ouais, c'est ça numéro 2. Qui est le numéro 1 ?... C'est vous ? Vous êtes la doublure du chimpanzé ? »
Et avec ça je me marre. J'explose d'un rire nerveux, jaune, plein de bile. Je faiblit et m'étouffe.
L'autre gars me saisit sous les épaules, je ne peux réagir. Il me traîne vers la porte et la lumière de néon. Je crois deviner des coursives étroites et des fils électriques le long des murs. Il me tire toujours, je croise des visages... Jules Vernes ! Des hommes en scaphandre me heurtent. J'approche d'un écran de télé empli d'étoiles.
« Non me bazardez pas ! No passaran ! Je suis pas mort bande de crevards ! »
Flash. J'ai chaud, je suis en sueur. Arte passe une rétrospective Steam-Punk-me-fesses. Merde, je suis au KB ! Au lit, entier et vivant. J'ai des coups de fil à passer.
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