Fragment #439 - De retour sur l'échiquier blanc

Les pièces sont en place. Les pièces vont et viennent, de cases en cases, tout droit, sur le côté, en L ou en diagonale. Cohortes de médecins-cavaliers d'infirmières-soldats, d'anesthésistes-fous et de psychiatres-tours. Mon père, dans tout ça, est l'incontestable roi. Je n'arrive pas à croire que toutes ces horreurs à son égard aient pu se déverser de ma bouche hier. Je n'arrive pas à croire non plus que mon propre père m'ait fait interner ici. Après tout, peut-être n'avait-il pas le choix ? Mes frères n'ont rien fait pour l'en empêcher.
Je suis allongé dans un lit aux draps blancs. Immobile. Je vois les êtres se mouvoir autour de moi, mais leurs traits sont flous et saccadés. Les sédatifs m'assoupissent en permanence. Ils ont le mérite d'éradiquer l'Ombre, mais ils me contraignent à ne plus pouvoir bouger. Seule ma conscience, prisonnière de ce corps dont j'ai perdu le contrôle, se débat du mieux qu'elle peut face à la matière.