Fragment #13 - Ceux qui viennent rendre visite aux malades

Heureusement, ils ne nous ont pas vu. On a eu peur pour rien. Papa et maman ne doivent pas savoir que je sors avec Robin, même si, du coup, Robin est un peu agacé. Lui il a dit la vérité à toute sa famille, et il aimerait que je fasse pareil. Ca peut se comprendre. Quand je vais chez lui, je suis accueilli comme un gendre, et pas comme un « pote ». Je pense qu'il aimerait aussi goûter à ça. Mais entre nos études et les soucis que me cause Julian, je n'ai pas le temps de trouver assez de courage pour en parler à mes parents, et leur avouer enfin que je suis gay. Avouer. Je déteste ce mot. Comme si j'avais commis une faute ! Et pourtant, je suis le premier à l'utiliser, ce mot. C'est bien, la leçon a été intégrée.
Je suis venu à l'hôpital pour voir Julian. Maura me dit que je viens de rater Florian et Léa de peu, et que je dois attendre un peu avant d'entrer, car le médecin est à l'intérieur avec mon frère. Je vais m'assoir sur un banc à côté d'une jeune fille blonde. Maura me demande si je veux boire quelque chose, je la remercie et lui dis que ça ira.
Je tourne la tête. La fille blonde, à côté de moi, c'est Déborah Spinner. Je la reconnais, elle venait de temps en temps au Dionysos. C'est une amie de Dimitri, le neveu de Louis qui partage la chambre avec Julian, et qui le remplaçait comme serveur.
« Salut, je lui dis. Tu viens voir Dimitri ?
- Oui. On se connaît ?
- Je suis Lilian, le frère de Julian, tu sais. On s'est vu plusieurs fois au Dionysos.
- Ah oui, c'est vrai. Qu'est-ce que tu fais là ?
- Je suis venu voir Julian, justement. Il partage sa chambre avec Dimitri ?
- Drôle de coïncidence. Pourquoi tu n'entres pas ?
- Pas le droit pour le moment, à cause des médecins. Je dois attendre quelques minutes.
- Ils ne veulent pas me laisser entrer non plus. Je suis venue plusieurs fois mais Dimitri est interdit de visites jusqu'à nouvel ordre. Je déteste vraiment ces hôpitaux. »
Nous gardons le silence un moment. Le médecin ne vient toujours pas.
« C'est vrai que c'est une drôle de coïncidence, quand même.
- Oui, elle répond, un peu dans le vague.
- Déborah, ça te dit qu'on aille boire un verre en attendant ? »