Quand part le train pour Quand ?

A l’opposé de Grand Corps Malade, moi les trains, je les prends à minuit vingt. Quand est sans nul doute la destination que je déteste le plus. Ah, si nous pouvions exterminer de nos cartes les villes Demain, Hier, Aujourd’hui, Jour, Nuit… Si nous pouvions sans cesse tourner nos regards vers la Lune, comme guidés par cette fausse et éblouissante virginité de couleurs, ce fléau qui nous veut du bien, ha si nous pouvions. Jamais. Jamais plus. Et le train y contribue. Ton train, mon enfant, il partira ni trop tôt, ni trop tard. Ca dépendra de la gare où tu te trouves, et de ses contrôleurs. As-tu reçu ton billet en arrivant ici ? Seigneur, mais tu es déjà si prêt ! Et cette question, ha, cette question ! Tu devrais t’en aller. A l’opposé de Quand. C’est une horrible ville, tu sais. Tu y trouveras bien d’étranges choses, aussi belles que terribles. As-tu emporté une folie dans ton sac ? Malheureux, je ne peux te donner la mienne, elle a grandit et est trop encrée pour ta chair bleue. Surtout ne m’écoute pas. File et ne te retourne pas, tu pourrais tomber sur les rails. Ton train, je ne sais pas, mon petit. Toi seul le sais. Et c’est bien dommage. Quand tu seras à l’intérieur, va dans le wagon 16. Trouves-y mon sourire. Respire-le et puis jette-le par le paysage qui ne t’attend déjà plus. Et là le signal des larmes se déclenchera, et là il sera trop tard. Là tu te rendras compte ô combien j’avais raison, mon petit. Le temps est une tumeur. Quand ton stade terminal. Pourris. Jusqu’à la moelle. Enfant de la pauvreté cervicale. Saute, maintenant, car le train t’attend et c’est bien le seul que personne ne rate. Alors par pitié arrête d’invoquer le purgatoire, souilleur de bonté. File, cours, vole et meurs. Avant qu’il ne soit trop tard. Quand est le début de la mort de ta petite personne. File, te dis-je ! Avant que je ne te dévisse la tête de mes désillusions et de mes balançoires rouillées… Vas-t-en et cours, il est déjà minuit dix.