Nunki
| Sujet: Fragment #16 - Dormez, sous le faux Soleil de ce vrai Printemps 01.05.08 11:54 | |
| Vendredi 9 février 2007 à Dijon J’avance à présent dans le port. Cette grande bordure longée de bancs, des canards et des oies qui picorent à côté de la piste cyclable, un décor que l’on croirait sorti d’un rêve ou d’un jeu vidéo. Le Soleil hivernal qui pointe ses rayons éblouissants mais faibles, comme de petites mains frêles qui veulent m’attraper. Une rumeur exquise parcoure la Terre et le Ciel. Cette rumeur est complétée par celle de l’eau, encore plus réjouissante. Je traverse le pont, à présent, et contemple les grands bateaux fleuris, les péniches accostées qui semblent faire la sieste sous les rayons froids du Soleil, mais une sieste presque festive, où chaque sujet se met sur son trente et un avant de s’endormir paisiblement sur l’eau bleue-verte du canal. Le vent secoue les arbres et mes cheveux, qui découvrent alors mes yeux bridés par la lumière. L’énergie des éléments de ce lieu m’envahit. Mon cœur se gonfle à chaque rafale de vent frais et vivifiant. Une adrénaline magique parcoure mon corps entier. C’est comme si je découvrais un lieu exotique, inconnu à mes yeux, mais souvent rêvé et imaginé dans ma tête. Mais je connais ce lieu, je le découvre juste sous un autre jour, un jour sous lequel je ne l’avais encore jamais vu. Je me rend chez Sonya, mon amie. Sonya, qui nous avait si gentiment accueilli le soir du réveillon. Elle est en classe préparatoire au Lycée Carnot, ce qui limite assez nos entrevues, puisque qu’elle travaille beaucoup chez elle. L’une de mes amis de lycée. Nous étions cinq. Sonya, Sarah, Mylan, Flora, et moi. Notre « petit clan » qui a perduré après le bac. Nous regrettons assez cette période que fut le lycée. Ce même établissement dans lequel nous avions tant imaginé, façonné et recrée la réalité. Nous étions un peu à part, bien que chacun d’entre nous s’entendait particulièrement bien avec les autres camarades de classe. Nous avions juste un quelque chose en commun. Je n’arrive pas moi-même à savoir exactement de quoi il s’agit. Pour ma part, peu importe. Cette sérénité, ce calme, cette rumeur, toutes ces choses qui viennent à moi en cet instant, tout cela me refait penser au bonheur que nous avons perdu. Le temps, les études, les lieux. Nous avons divergé et vivons chacun de notre côté à présent. Nous ne partageons plus nos études. Nous ne partageons plus les mêmes plaisirs. Sommes-nous condamnés ? Je ne veux pas que ça finisse comme ça. Alors j’oscille, tant que je peux, entre ces quatre personnes. Mais alors, nous ne sommes pas quatre, mais cinq ! J’avais oublié Sonya. Aujourd’hui, je veux rattraper ce retard. Si nous sommes cinq, l’équilibre du quatre est rompu. Je m’amuse encore à réfléchir à des petites superstitions superficielles. Sonya a toujours été un peu plus discrète par rapport aux autres. C’est une fille très gentille, mais assez rigide sur certains points. Ça n’en fait cependant pas quelqu’un de peu compréhensif. J’arrive à son perron, jette un dernier regard au canal étrangement printanier, puis appuie sur la sonnette. C’est elle qui ouvre, d’un large sourire. | |
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