Fragment #414 - La bourde

En sortant de McDo, j'embrasse Goran rapidement et lui dis que je vais passer chez Laura pour voir comment elle va, qu'il n'a qu'à m'attendre chez lui et que je le rejoindrai ensuite. Je traverse la Place de la République et descends le Boulevard Voltaire jusqu'au croisement de la rue Oberkampf, coupe le Boulevard Richard Lenoir et continue jusqu'à la rue de la Folie Méricourt. Mes pas me guident vers l'appartement de Laura, et je songe que la rencontre d'hier avec Jérôme et Damien aura au moins contribué à me secouer un peu (vous savez combien je suis peu disposé à aider les autres par moi-même). Je sonne. Simon vient m'ouvrir et me fait la bise.
« Laura ? Elle est pas là, elle reste presque jamais ici depuis que son père... enfin bref, je sais pas ce qu'elle fait de ses journées, et du coup le film n'avance pas. Elle va pas bien ça c'est sûr, tu veux boire quelque chose ?
- Non, merci Simon, je vais y aller, je veux pas te déranger.
- Tu me déranges pas, au contraire. Je disais à Laura l'autre jour qu'on devrait se voir plus souvent. Tu veux un café ?
- Ok, un café alors. »
J'aime bien leur appartement, la moquette sur le sol, une grande pièce carrée divisée en plusieurs espaces (chambre, cuisine, salon, bureau), les couleurs marrons et vert pomme, avec parfois une touche de violet, comme dans ce bar dijonnais près du centre Dauphine, le Dinabar, très design. Simon porte une chemise noire et un jean serré. Il va et vient sans chaussettes, met sa cafetière en route tandis que je m'installe sur le canapé.
« Et toi Julian, quoi de neuf alors ?
- Rien de particulier, je bosse toujours à MacDo, je vis chez mon copain-
- Ton copain ?
- J'suis bi.
- Ok. »
Il hausse les sourcils en apportant les tasses.
« Et tu comptes rester longtemps à MacDo ?
- J'aimerais mieux pas. Mais bon. En attendant de trouver autre chose, y faut bien que je vive.
- Donc tu cherches ?
- ... Non...
- Haha, ok. Moi je dois écrire mais c'est galère.
- Tu écris ?
- Ouais, tu sais bien, je veux être scénariste moi plus tard...
- C'est vrai oui. J'écris aussi, en fait.
- Ah bon ? Tu écris quoi ?
- Un bouquin. Enfin, j'essaye.
- C'est génial ! De quoi ça parle ?
- Heu...
- Sois pas timide Julian, tu peux me dire franchement, je sais que des fois on ose pas mais avec moi tu peux y aller.
- Eh ben... ça parle d'un garçon, qui s'appelle Arthur. »
Simon m'écoute avec attention. Cet intérêt précieux m'encourage à poursuivre.
« Il descend d'une famille très ancienne qui remonte jusqu'aux Âges Obscurs de la Grèce Antique, et il a des pouvoirs surnaturels. En gros, c'est une sorte de super-héros.
- Mais, continue Simon, contrairement aux X-men et autres Heroes, ses pouvoirs ne lui viennent pas d'une mutation futuriste, mais du passé... J'avoue, j'aime beaucoup cette idée !
- V-vraiment ?
- Vraiment ! J'ai un pote qui bosse dans l'édition, si ça se trouve ça peut l'intéresser.
- Ca m'étonnerait, c'est pas génial tu sais.
- Tu plaisantes ? Laura m'a dit que tu écrivais super bien...
- Ouais oh à l'époque je lui écrivais des lettres d'amour enflammées, mais c'est pas très- »
Je m'arrête, en prenant conscience de ma bourde. Simon revient de la cuisine avec le café.
« Tu peux répéter ? dit-il. »