Fragment #9 - Au réveil

Les nuits dernières m’ont fait douter de la non-existence de Dieu, pourtant si fondamentale chez moi, et cette communion charnelle insolite et inattendue me remplit de joie. Bernard, le Père Seguin (car c’est son nom), a 47 ans, prêche à la paroisse de Notre-Dame-des-Champs, a les yeux noirs, le cheveux rare, le dos presque voûté, mais possède ces mains incroyables desquelles surgissent des colombes blanches lorsqu’il les agite en parlant.

Vous m’autoriserez à rester pudique sur ces nuits. Les semaines précédentes, j’avais succombé à la tentation de vous raconter celle avec Philippe, mais notre entrevue sexuelle m’avait permis d’exulter. Les nuits avec Bernard sont différentes, je… je tâcherai les prochains jours de trouver des mots pour les décrire.

Ce matin, néanmoins, en bas de l’escalier menant jusqu’à sa chambre, ouvrant la porte du presbytère donnant sur la rue, j’ai rencontré une femme. Plusieurs indices m’ont permis de comprendre qu’il s’agissant de la femme de ménage de l’église. Vous êtes un ami du Père ? Il est encore chez lui ? Je venais de l’abandonner dans son lit, les draps défaits, la chambre sentant encore l’amour, et l’idée de la faire monter me semblait mauvaise. Non, il n’a pas dormi chez lui. Où avez-vous dormi, alors, et qui êtes-vous ? Elle devenait féroce, en jetant un œil mauvais à mon débardeur moulant.

Les événement s’enchaînent parfois mal, et la pire des situations peut parfois suivre le plus incroyable des voyages nocturnes. L’entrée fracassante de la femme dans le presbytère, après notre bref entretien, ses cris répétés pour appeler Bernard… Les forces me manquent, je pars dormir, je dois me reposer...
Je ne pourrai le raconter que demain.