Fragment #6 - Le Brouillard

Douleurs, sursauts et sueurs. D’une giclée de sang dans mes artères ma conscience se réveille. Je sens battre mon cœur dans mes paupières, elles tremblent, mes yeux se révulsent et mon corps se cabre. Le noir de nouveau, un noir profond, sans issues. Je suffoque.
Où suis-je ? Je me force un regard vers la lumière tamisée, comme si elle était altérée par une fumée opaque. Tout est flou, les couleurs varient entre blanc, rouge et vert. Les bruits se font adoucis, comme si j’étais coupé de l’extérieur, comme si je me noyais. Le manque d’oxygène se fait sentir et l’humidité est présente, mais pas d’eau, j’étouffe. Je ne situe pas bien mon corps, où se trouvent mes jambes, mes bras, mon buste et ma tête ? Et reprends contrôle un par un de chaque muscle, chaque articulation. D’abord les pieds, les jambes, la colonne, les bras, les mains, la nuque. Tout reste flou, incertain. J’essaye de forcer sur ma vue, mais rien n’y fait, c'est le brouillard complet. Ma respiration se fait de plus en plus haletante. A chaque inspiration une matière fibreuse entre dans ma bouche, m’interdisant l’accès à plus d’oxygène. Un bruit de froissé ponctue chacune de mes respirations. On dirait que ça vient de l’intérieur de ma tête, je ne comprends pas. Je ne réfléchis plus, tout se fait plus lent comme si je fonctionnais au ralenti, comme si j’étais entrain de m’éteindre. J’approche mes mains de mon visage mais je ne rencontre pas de peau. Ma tête est emprisonnée dans une matière souple, grasse. Je ne réalise pas. Je n’ai plus d’oxygène. J’ai beau inspirer, l’oxygène ne vient pas, juste la matière élastique. Je commence à perdre connaissance. Dans un dernier effort j’arrache cette peau artificielle, la lumière aveuglante me fait face, me brûle les rétines et en même temps l’air frais gonfle mes poumons et calme la douleur. Les yeux fermés je prends de grandes inspirations et je sombre doucement dans l’inconscient, paisible, pas sain, mais sauf.