Fragment #484 - De plafonds en plafonds

La démarche pour l'appartement avance petit à petit. Il faut signer des papiers, s'occuper de tout un tas de choses très ennuyeuses. Heureusement, travailler à la boutique d'antiquités ne me demande pas beaucoup d'efforts, alors je prends le temps d'organiser ma future nouvelle vie, ma vie avec Lola. Elle ne sait pas encore que j'ai trouvé l'appartement parfait pour nous deux, du moins, elle ne sait pas que nous pourrons y vivre dès le début du mois de janvier. J'ai peur de la brusquer, mais le type s'est suicidé et l'agence cherche de nouveaux locataires le plus rapidement possible. C'est une opportunité en or, quand on sait combien il est difficile de trouver un toit sur Paris à un prix correct. Ici le quartier est très sympathique, j'y ai des amis, la Cité de Crussol (notre résidence) est un petit havre paisible, et l'appartement en question peut accueillir un jeune couple et leur bébé. Forcément, en attendant, mon livre n'avance pas, et je n'ai pas encore d'idée quant à ce que je ferai après avoir rendu la garde de la boutique à Maya. Il me faudra un travail, et vite, sinon nous serons dans l'incapacité de payer le loyer, et il est hors de question de demander de l'aide à mes parents. En plus de l'appartement, j'aurai à ma charge la petite bouche de Kokhavah à nourrir. Lola devra travailler aussi, je ne pourrai pas m'en sortir seul. Ces perspectives financières m'effraient, et pourtant, je sais que nous en sommes capables, je sais qu'une fois toutes les choses imbriquées et stabilisées, nous serons heureux.
J'ai vécu dans la maison de Papa et Maman, Avenue Victor Hugo à Dijon, puis dans un bel appartement Place Grangier, puis en collocation avec mon frère Lilian dans la rue du Docteur Chaussier. J'ai vécu brièvement à Londres, chez les grands-parents de Jed. Puis je suis monté à Paris, et j'ai vécu chez Nathan, avant de partir en Espagne où j'ai vécu dans des hôtels, à Séville, Madrid, et enfin Barcelone. De retour en France, on m'a enfermé dans un hôpital psychiatrique. Et pour finir, me voilà en collocation avec Juliette et Sergueï. Tout ce chemin parcouru deux ans et demi, tous ces plafonds contemplés. Comment était-ce, la formule, déjà ?

Sur combien de plafonds, combien de ciels de plâtre, nos yeux de plomb rivés, décompteront les astres ?

Je souris en repensant à l'époque où cette petite phrase m'était venue en tête. J'étais à Paris, été 2006, je dormais chez Nathan. Si je pouvais retourner dans le temps et apprendre à mon moi du passé tout ce qui est sur le point de lui arriver, il aurait sans doute peine à me croire.
Et maintenant, qu'est-ce qui va m'arriver ?