Tureïs
| Sujet: Fragment #44 - Comme des animaux 29.01.09 22:31 | |
| Jeudi 29 janvier 2009 à Amiens Je quitte le lycée, Elyan à mes côtés, ange déchu vêtu de noir. Nous marchons lentement, sans nous presser. La journée a été belle quoique froide, l’odeur de l’hiver imprègne de nouveau l’air, et le ciel est encore bien dégagé. - Tu veux manger quoi ce soir ? - Je ne sais pas, ce que vous voulez. Le vouvoiement me choque. Cette distance qui me protège au lycée semble soudain déplacée. - Tu peux me tutoyer, en dehors du lycée. Il ne répond pas, perdu dans ses pensées. Je me demande ce qui peut à ce point l’absorber. C’est étrange, je n’ai plus l’habitude de me soucier des gens et de ce qui les préoccupe. Avec Elyan c’est différent, j’aimerai connaître chacunes de ses pensées. - Au fait, ma mère m’a donné ça pour vous. Il me tend une enveloppe de laquelle dépassent trois billets de cinquante euros. Je la saisis un peu gêné. - Bien, dans ce cas on va s’offrir un japonais. - Si vous voulez. Son ton amorphe commence à m’agacer. Je n’ai peut-être pas envie de partager mon intimité avec un lycéen. D’autant plus qu’il peut raconter ce qu’il veut au lycée. Je sais que sa présence ne me dérange pas, mais lui qu’en sait-il ? La moindre des choses serait qu’il essaie de m’être agréable. La vendeuse est mal aimable, nous prenons des menus à emporter sans demander notre reste. Je ne lui ai pas parlé du chat, j’espère que ça va le dérider, car là je suis un peu à court d’idées. J’ai l’impression qu’un mur de brique s’est dressé entre nous, quelque chose doit le perturber. Il pose ses affaires au sol et file s’asseoir sur le canapé pour regarder la télé, comportement typique d’un adolescent mal luné. Soudain je réalise que le sol est jonché d’ordures et que la poubelle est déchiquetée. Putain de chat ! - Tureïs ! - Quoi ? La tête d’Elyan apparaît, son regard se pose sur le sol et revient sur moi, légèrement amusé. - C’est son nom ? C’est joli. Dans ses bras, le chaton me fixe de son regard bleu azur. - Ouais, c’est ça. Pose ce chat et viens m’aider. Elyan soupire et commence à ranger, nous nettoyons rapidement la cuisine et je l’envoie à la douche. Il ressort un quart d’heure plus tard en boxer. - Tu veux bien t’habiller ? - Pourquoi ? - Parce que ça me gène, on ne se connaît pas alors va t’habiller. - C’est bon ! Vous n’avez pas à me forcer. Ne me regardez pas si ça vous gêne. Il s’en va, en colère, et se plante devant la télé. Merde, je ne sais pas comment lui expliquer. - Écoute Elyan, je ne peux pas t’accueillir chez moi alors que je suis ton surveillant et te laisser te promener chez moi en boxer, si ça se sait je risque d’être licencié. - Pourquoi quelqu’un le saurait ? Vous croyiez que j’ai envie que ça se sache que je n’ai pas d’amis pour m’héberger, que je suis obligé de squatter chez un pauvre surveillant raté ? Vous êtes vraiment à côté de la plaque. Quel sale con. Sale morveux, que sais tu de ma vie ? Tu t’es vu avec ton petit boxer rose bonbon ? J’ai envie de lui foutre une beigne. Je me contrôle difficilement, surpris par ma propre violence. Je me calme doucement sous le jet de la douche, ma colère s’évacuant avec la saleté de cette journée. Je mets un peignoir et m’observe dans le miroir. C’est bon, « be zen ». Lorsque je sors Elyan est toujours sur le canapé, Tureïs allongé sur ses genoux les yeux fermés. - Viens, on va manger. Il soupire et me rejoint dans la cuisine. Nous mangeons en silence, rapidement. La tension est palpable et désagréable. Je pars dans le bureau, un verre de vin à la main, une fois le dîner terminé. Je n’ai pas envie de rester avec lui, je me sens exclu de mon salon par sa simple présence. - Vous m’en voulez ? Elyan se tient dans l’encadrement de la porte. Sa posture et son regard m’indique qu’il se force et qu’il ne se sent pas entièrement responsable de ce qui vient de se passer. Je ne sais pas quoi faire, ce n’est pas mon rôle de l’éduquer. Je n’ai pas envie de gâcher la soirée, pas envie de lutter. - Non, y a pas de souci. - Vous faites quoi ? Il s’approche dangereusement de mon ordinateur. Je panique et ferme la fenêtre internet. - Rien, je regardais les films qui pourraient t’intéresser. - Je peux voir ? - Oui bien sûr. Il vient se positionner juste derrière moi, son torse nu presque sur moi, son bassin proche de mes reins. Je le laisse regarder, de plus en plus mal à l’aise. - On pourrait regarder Twilight non ? - Si tu veux. Va t’installer devant la télé, j’arrive. Je replace mon pénis érigé et lance le logiciel de partage. Quelques minutes plus tard, nous regardons, installés dans le canapé, le film commencer. Dès le début je trouve que c’est nul, grossié. L’histoire est intéressante mais les personnages semblent si niais que seuls des enfants de douze ans peuvent réellement l’apprécier. - Vous ne semblez pas vraiment vous intégrer à l’équipe du lycée. Il n’a même pas tourné la tête pour me parler. - Je t’ai dit qu’en dehors tu peux me tutoyer. - Ouais, je sais. Le silence se réinstalle entre nous, je crois que je l’ai vexé. Le film continue dans la même veine, ennuyeux et simplet. - Vous… Tu n’aimes pas travailler au lycée ? Merde, il ne va pas me lâcher. - Ça n’a rien à voir, c’est juste un lieu de travail, je n’ai pas envie de mêler vie professionnelle et personnelle. - Et tu fais quoi là ? Quel chiard ! - Je n’ai pas trop le choix. - En gros tu fais ça parce que t’es obligé, pour l’argent, pas pour moi. Merde, merde, merde. C’était donc ça qui le perturbait. - J’ai pas dit ça. - Ouais c’est bon pas besoin de vous justifier. J’arrête le film et me tourne vers lui. - Écoute, mes collègues ne m’intéressent pas, l’horizon de leur vie ne s’étendra jamais au-delà de leurs petits préjugés. Alors, avec eux, je n’ai pas envie de développer quoi que ce soit. Toi c’est différent. Même si t’es un de mes lycéens je te trouve intéressant et enrichissant. Ça te va ? Je me suis un peu énervé, mais ce petit con commence à me courir sévèrement. - Ok. On peut regarder le film ? Il sourit l’air satisfait. Je le hais.
Une heure après m’être couché, il n’est toujours pas là. Peut-être que la première nuit était différente. Peut-être qu’il dort déjà. Peut-être qu ‘il ne viendra pas. Je suis énervé, le sommeil me fuit, tandis que mon esprit obsédé se demande ce qu’il fait. Quelques minutes ou des heures plus tard, je ne sais pas, la porte de la chambre s’ouvre doucement. Elyan s’incruste sous les draps et s’allonge près de moi. Tureïs ne se réveille pas, boule de poils épuisée d’avoir trop joué. Satisfait, je sens son corps me coller et son bras m’entourer. Une sensation de bien être m’envahit tandis que son souffle effleure ma nuque, j’écoute sa respiration se calmer, s’allonger. Son bras se détend et devient plus lourd, mais reste accroché comme un noyé à sa bouée. On cherche peut-être tout simplement notre place, nos égos se frottent, se piquent. On se renifle comme des animaux.
Dernière édition par Tureïs le 27.09.09 12:43, édité 3 fois | |
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Procyon
| Sujet: Re: Fragment #44 - Comme des animaux 29.01.09 22:44 | |
| J'aurai préféré qu'Elyan ne le rejoigne pas. Ca aurait puni Maël de fautes que Turéïs fait (pas le chat) - mais sur cette longueur tu es pardonné -; et surtout ça m'aurait évité de chopper une érection avec cette fin sensuelo-seductrice voire lacivo-sexuelle !^^
Il était long mais bon (ce frag ^^) :P
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Tureïs
| Sujet: Re: Fragment #44 - Comme des animaux 29.01.09 22:51 | |
| Les dialogues prennent beaucoup de place, mais ne sont pas longs à lire... Heureux que ça te plaise ^^ | |
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Altaïr
| Sujet: Re: Fragment #44 - Comme des animaux 29.01.09 23:39 | |
| J'avoue que moi aussi ça a de l'effet sur moi les fragments dans lesquels tu parles d'Elyan :P | |
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Alcor
| Sujet: Re: Fragment #44 - Comme des animaux 30.01.09 1:41 | |
| Ah ben je vois que je suis pas le seul à faire des fragments un peu longs
Moi j'ai bien aimé, mais encore une poubelle éventrée et je donne pas cher du pauvre petit Tureis (le chat!) | |
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| Sujet: Re: Fragment #44 - Comme des animaux | |
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