Shedar
| Sujet: Fragment #18 - Super Dimitri, super silencieux 11.04.08 12:25 | |
| Vendredi 2 mars 2007 à Dijon Ca vibre. C’est Déborah. « retrouve moi tou 2 suite o parc de la toison. Il fo ke je te parle absolument c urgent. dépèch toi stp. » Je n’aime pas les SMS SOS, et celui-ci sent plutôt mauvais... Ca sent la mauvaise nouvelle... Pas d’hésitation. « J'arrive tou 2 suite. Attends moi surtou » Et envoyer. Je rends mon portable à ma poche, puis relève les yeux. Je ne suis pas vraiment là où cela m’arrangerait d’être. Je me lance immédiatement dans un marathon effréné à travers ma ville, qui m’encourage à chaque instant. Chaque petit bonhomme est vert, aucune voiture ne tente de me faucher, et pas une seule mamie ne laisse traîner son caddie ou son cabot sur ma trajectoire. Le monde entier semble s’être arrêté pour me laisser passer... Et je me sens brave comme un pompier... Sapeur Dimitri... Super Dimitri... Déborah... J’arrive !... Un deux, enfin. Mais il est loin... Je n’ai même pas le temps de souhaiter que le feu passe au rouge que mon vœu se réalise. Le trajet est insupportable. Je suis confortablement assis et ne peux rien faire de plus qu’attendre que le chauffeur veuille bien se dépêcher de déplacer son foutu bus jusqu’à l’autre bout de ma ville, qui semble m’avoir abandonné. J’espère que la raison de cet appel au secours n’est pas trop grave... A cet instant j’aimerais avoir les pouvoirs de Clark Kent pour courir jusqu’à toi, Déborah... Devant moi ce mioche me regarde comme si j’avais les oreilles pointues de Batman. J’improvise une grimace en ouvrant mes yeux comme deux grandes bouches muettes mais convaincantes. Le monstre retourne aussitôt se cacher dans les bourrelets de sa mère. Le terminus, enfin. Je descends en premier, et dès que mon regard trouve Déborah, me mets à courir dans sa direction. Je sers ses épaules entre mes mains et lâche un « Ca va ? » des plus stupides. Je sais très bien qu’elle va mal. Elle est pétrifiée, tremble de tout son corps. Je l’invite à marcher, elle me suit comme un robot. « Déborah, s’il te plait, parle-moi ! » La jeune fille hésite une seconde, inspire une énorme bouffée d’air et se lance dans le récit de sa soirée, torrentiellement... Déborah qu’est ce que tu faisais si tard à la bibliothèque ? Tu travaillais encore ? Tu travailles trop, vraiment... Un jour ton courage se retournera contre toi, fais attention... Un cri !? Des insultes et des cris !? J’aime pas ça... Peut-être que ce jour est arrivé... Je t’avais déjà vu enthousiaste, stressée ou même énervée, mais jamais je ne t’avais entendu parler si vite. Et tu trembles encore... Déborah, calme-toi... J’aime pas te voir comme ça... Et ils l’ont frappé à deux alors qu’il était par terre !? Déborah non ! Tu ne peux pas t’en vouloir d’être partie en courant ! Tu aurais fait quoi !? Tu te serais battue toute seule contre ces bandits !? Mais Déborah on n’est pas au cinéma !... Tu n’aurais pas pu sauver ce garçon... Tu le sais autant que moi. Et lui aussi le sait ! Même s’il t’a vu lui aussi, il ne t’en voudra pas, je te le promets... Elle s’assoie sur le premier banc venu, recueille sa tête au creux de ses mains... Déborah, si tu savais comme j’aimerais te rassurer, trouver les mots justes... Mais les mots manquent... Déborah, si tu savais comme je m’en veux... | |
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