Shedar
| Sujet: Fragment #26 - Je me demande 11.04.08 12:32 | |
| Lundi 7 mai 2007 à Dijon Aurore amère. Des minutes passent, et les couleurs du ciel... Les couleurs du ciel sont fades. Quelque chose a changé hier soir. Pourtant je me demande encore. Je me demande. Moi, ça va. Mais ma ville, mon pays. Je ne sais pas. Autour de moi, tout se demande encore aussi. Peut-être qu’on avait besoin de ça, de lui, peut-être qu’on n’aurait pu l’éviter aussi, peut-être qu’on aurait dû, peut-être qu’elle aurait fait mieux, peut-être pas. Mais c’est fait. Alors c’est fatigant. Et puis je n’ai même pas voté hier, alors ce n’est pas à moi de me poser toutes ces questions. Pourtant je me demande. Les parents disent qu’une fois de plus on verra quelques dizaines d’émeutes enflammer quelques centaines voitures et quelques milliers de poubelles, puis les forces de l’ordre brandiront leurs matraques et leurs boucliers. Peut-être devraient-ils apprendre à faire des figures avec leurs boucliers avant de passer à la télévision. Comme les soldats romains dans Astérix... La plupart des arbres sont nerveux. Certaines feuilles se laissent même mourir prématurément. Les oiseaux qui chantent fort chantent faux. Dernier virage, derniers pas, j’arrive chez Michelle. Ici tout est différent. Ici, il semble ne pas y avoir de président... Elle et son sourire m’accueillent de leur voix chaleureuse... « Je savais que tu viendrais hier soir ou ce matin, et puisque hier soir tu n’es p... Bref, entre et sois le bienvenu. » A l’intérieur, tout est intact. A peine le temps de me déchausser qu’elle passe devant moi avec son plateau et mon chocolat chaud. Le chat suit. Je les rejoins dans le salon, savoure chaque instant comme si le temps était désormais plus précieux ici qu’ailleurs. Je ne pensais pas que changer de président serait si effrayant. C’est la première fois, mais quand même. J’en suis même rassuré que le fauteuil soit toujours aussi moelleux et le chocolat toujours aussi délicieux. Pourtant rien de cela n’est du ressort d’un chef d’état ou de son gouvernement, quels qu’ils soient... Je me demande... Michelle est silencieuse. Silencieuse mais souriante, confiante. Comme moins concernée par tout cela. Pas à l’écart, mais à l’abri, à l’abri de tout ce qu’on pourrait craindre... L’horloge me rappelle du bout de ses aiguilles que le reste de ma vie m’attend ailleurs. Une dernière gorgée et je mets les voiles... Dehors, les inquiétudes semblent s’estomper peu à peu, mais qu’un peu. Je crois qu’il va falloir que je vienne me ressourcer ici plus souvent... Bienvenue dans l’ère Sarkozy. | |
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