Fragment #123 - Art

La lumière coule comme de l‘or fluide, le ciel est d’un bleu napolitain, à la fois profond et tendre. Le soleil d’automne brille au dessus de Paris, baignant la capitale de tons dorés, habillant les immeubles blancs d‘une couche d‘orange luminescent. D’ici je vois la Défense, la tour Eiffel, Notre Dame. Ici, c’est au musée Beaubourg où je suis sensé regarder l’expo permanente. Là, pour le moment, je dévisage Paris depuis le balcon tout en fumant une cigarette. L’air est frais mais beaucoup moins agressif qu'hier.
Je suis venu seul. Pas envie de m’embêter avec quelqu’un, pas envie de devoir négocier mon rythme avec celui d’un autre. J’aime déambuler sans but, snober certaines œuvres et en contempler d’autres durant de longues minutes. Certaines œuvres sont horribles, d’autres bizarres ou juste surprenantes comme un cube de cure-dents de la taille d’un gros ballot de paille, un film où l’on voit une salle où les néons tombent petit à petit jusqu’au noir total… L’être humain semble avoir une capacité créatrice infinie et pourtant certaines me semblent inutiles, inintéressantes, parfois stupides. La population qui visite le musée est spéciale, des gamins chahutent et hurlent dans les couloirs, sous les yeux bienveillants de leurs mères et ceux, agacés, des passants. Des jeunes garçons et des jeunes filles hyperlookés croisent des trentenaires du même genre, style bobos artistes. Insupportable.

La fumée s’envole et flotte vers Paris, légère, immatérielle, ruban bleuté et lactescent. Brume évanescente et éphémère, artistique ?
Je quitte le musée et me redirige vers chez Babeth. Je dois prendre le thé avec elle, discuter de sa thèse, de ma reprise des cours. On va essayer d’être une famille, à deux, malgré nos vies différentes, malgré nos choix, nos désirs...

Elle me manque. La famille.