Fragment #37 - Notification

Hier en fin d'après-midi, Axel n'est pas venu au goûter chez Ninon, et je crains que Yann ne cherche à prendre sa place dans le groupe. Nous avons mangé des gaufres et regardé la télé, et je n'ai pas cessé de penser à Adva et au rituel de samedi soir. Est-ce que mon père est vraiment à Paris ? Est-ce qu'un esprit est venu prodiguer son savoir extralucide pour de vrai ? Ou bien est-ce que nos doigts tremblants n'ont pas dirigé le verre à notre insu, obligeant les lettres du mot « Paris » à former la seule réponse que j'attendais ? De la même manière, j'ai sans doute influencé les coups de chance d'Amira, lorsqu'elle voulait faire dire à l'esprit des choses que j'étais le seul à connaître. Je ne sais pas si je crois à tout cela, mais Adva et Amira ne semblent pas douter. Peut-être qu'avoir une médium pour mère les encourage à se pencher sur le monde occulte. Est-ce qu'elle m'apporterait des réponses, si je la consultais ? Est-ce que j'aurais le courage de lui demander mon avenir ?

En rentrant ce soir après le collège, je trouve maman et Greg affalés sur le canapé, dans un état de léthargie avancé. Maman essaye de me disputer, elle a appris que j'ai séché le cours de théâtre vendredi dernier, mais sa colère tombe comme un soufflé, avant que la télé ne happe son attention affaiblie. Sur la table du salon, je vois un petit kit de pharmacie, avec des seringues et un briquet, et d'autres instruments. Je m'enfuis dans ma chambre, et claque la porte un grand coup. Je sais que maman n'est pas malade. Je sais qu'il ne s'agit pas de médication. C'est un poison qu'ils s'injectent pour oublier le monde. Un truc mauvais qui gicle dans leurs veines et qui efface la douleur et la peur. Greg en prend depuis des années, il est en train d'initier maman. Je voudrais pleurer, mais les larmes ne viennent pas. Seule ma colère gronde à l'intérieur, silencieuse et sourde.

J'allume l'ordinateur et me connecte à Facebook. Une notification reçue.
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