Alsciaukat
| Sujet: Fragment #12 - Salut Léo ! 11.04.08 22:11 | |
| Samedi 16 septembre 2006 à Tours Je laisse mon regard se perdre dans le mur qui me fait face, profitant simplement du calme de la salle. J’y suis seul, j’ai fini sans trop de difficultés tous les exercices que j’avais à faire pour la semaine prochaine, je n’ai plus qu’à rentrer chez moi quand je le désirerai. Je ne sais pas vraiment pourquoi je suis mieux dans cette salle de permanence que dans ma chambre pour travailler, mais c’est ainsi. L’ambiance y est sans doute plus impersonnelle, plus froide et scolaire, je ne suis pas dans cet espèce de cocon oppressant que peut parfois devenir la maison vide. J’y reviendrai seulement pour manger, puis j’y resterai, sur internet probablement. Un week-end à jouer sur msn. Des bruits de pas retentissent derrière moi, qui ne ressemblent pas à ceux de la pionne qui passe stupidement toutes les quelques minutes pour voir si tout est calme. Je ne bouge pas, espérant que les gens passeront leur chemin pour ne pas troubler cette pauvre âme esseulée au milieu de la salle. Raté. Marie s’installe bruyamment en face de moi en lançant : « Salut Léo ! Tu fais quoi ? » Je la regarde avec la face la plus inexpressive possible. Je ne sais pas si c’est que ma tentative d’inexpression vient d’échouer, ou bien si qu’elle a au contraire trop bien réussi, mais Marie éclate de rire. Alexandre arrive à côté d’elle et, avec un sourire condescendant, la morigène : « Doucement avec ce pauvre Léopold, il travaille, et tu viens l’agresser… » Pour le coup, je ne sais comment réagir. Marie est une fille qui parle un peu à tout le monde dans la classe, très ouverte, qui a l’air de bien comprendre ce que racontent les profs malgré une attention parfois dissipée durant les cours. Alexandre est son petit copain, à priori pas mauvais non plus, un peu plus discret, souvent en retrait d’elle. Je ne pensais même pas qu’ils avaient pu retenir mon prénom. Je regarde ma montre. Nos cours sont finis depuis une heure et demi, je me demande ce qu’ils font encore ici, d’autant que ces deux-là habitent sur Tours même, et pourraient donc être chez eux. Marie se penche vers moi, une expression joviale et intriguée plaquée sur le visage. « Tu as perdu ta langue ? - Je travaillais. » Elle se redresse, les yeux pétillants. Elle n’a pas l’air conne, par rapport aux autres. Juste beaucoup trop bruyante. Elle fronce les sourcils, ce maudit sourire toujours plaqué sur son visage. A côté d’elle, Alexandre lâche un petit rire en lui tapotant le dos. « Bien sûr, Marie, que tu es bête ! Les gens droits sur leurs chaises, toutes affaires pliées devant eux qui regardent le mur travaillent, comme il est stupide de se poser la question ! » Il m’agace autant qu’il m’intrigue. Bien qu’il soit effectivement évident que je n’étais pas en train de travailler, je crois que la majorité des gens se seraient contentés de ma réponse. Lui non. Je me lève en rangeant rapidement mes classeurs étalés sur la table, manquant de bousculer mes camarades. « Je dois y aller. » Pourquoi viennent-ils perturber ma tranquillité, ces deux-là ? Le visage fermé, en colère, je me dirige vers la sortie, ignorant le double « bon week-end » qui m’est lancé par derrière. | |
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