Altaïr
| Sujet: Fragment #16 - Orage Magnétique 09.04.08 14:04 | |
| Samedi 6 mai 2006 à Dijon Un ciel d’azur s’étale au dessus de nous. Jill et moi sommes allongés entre le vert et le bleu, dans le calme apaisant du parc de la Colombière. Aucune colombe à l’horizon, mais quelle paix sereine plane en ces lieux ! Je découvre peu à peu le vrai visage de Jill. Aujourd’hui, elle m’apparaît bien moins superficielle qu’elle ne me semblait être les premiers jours. Comme moi, elle semble aspirer à retrouver la simplicité des petits riens du quotidien, ceux qui nous charment depuis notre enfance. Ici, dans ce brin de nature enclose au cœur de la ville, nous accédons aux souvenirs paradisiaques de l’âge le plus tendre, même si Jill et moi ne nous souvenons pas avoir jamais apprécié la vie sans souci des bambins. Enfant déjà, je me torturais l’esprit à la recherche de réponses, de réponses à toutes ces questions qui, trop précocement sans doute, hantait ma petite cervelle. Florian et Lilian ne cessaient de se battre, et je me retrouvais entre eux, seul, à rêvasser, seul. Finalement, on pourrait croire que peu de choses ont changé depuis, qu’il s’agisse de la guerre sans merci que se livrent toujours mes frères, ou bien de moi, un peu perdu dans mes nuages. Sauf que je ne suis plus seul. Au dessus de nos têtes, un grondement commence à trembler. Pour la première fois, Jill se met à me parler de son passé. « Ma mère est morte quand j’avais huit ans, me dit-elle d’une voix remarquablement posée. Mon père était alcoolique. Je sais que ça peut faire un peu cliché, que ça ressemble à une histoire de feuilleton pourri à la télé, mais c’est ma vie, en gros un véritable navet ! - Ne dis pas ça, réponds-je en détournant les yeux (sans doute par gêne, comme si, tout compte fait, je n’avais pas voulu savoir ça, et encore moins qu’elle poursuive son récit). » Jill poursuit : « Pas de mal à dire qu’on aime pas sa vie Julian. Moi j’ai commencé à aimer ma vie depuis que je suis devenue indépendante, mais pour le reste, avant, je déteste tout. » Un coup de tonnerre retentit dans le ciel. L’orage s’amoncelle. Déjà la lumière décroît pour se changer en ombre. Les ténèbres tombent des frondaisons. Le ciel se fait mat, presque noir, et on entend les pas de Jupiter arpentant avec fureur les dalles vaporeuses de sa demeure sub-terrestre, prêt à déverser sa rage sur nous. Nous nous relevons en hâte sous la pluie qui se met à tomber, et courrons pour quitter le parc. Soudain Jill se jette sur moi avec violence, et nous tombons à la renverse dans l’herbe mouillée, sous l’averse. Il pleut de plus en plus fort sur nos tee-shirts d’été, et déjà nous voilà trempés, tandis que Jill m’embrasse passionnément, que les éléments grondent, furibonds. Deux petites particules d’orage magnétique sont aimantées l’une à l’autre…
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