Sargas
| Sujet: Fragment #48 - Naissance de l'Acide 11.04.08 22:29 | |
| Dimanche 2 décembre 2007 à Lille Chaque couche de ma peau cède sous la pression de la lame. Petit à petit, des sillons rouges se creusent. Des gouttelettes se forment, telles de minuscules éruptions volcaniques, reliées par des coulées qui s'épaississent tout doucement. Mon sang est pourpre. Presque noir, signe d'un sang manquant d'oxygène. Trop renfermé. Comme moi. Il noircit pourtant encore plus au contact de l'air. Mais surtout au contact du tapis de la salle de bain. Mon sang en ruisselant de mon poignet, explose en nombre de petits points sur le rebord du lavabo, qui perlent sur le tapis. Une constellation d'étoiles rouges et noires dans un ciel blanc. Je suis absorbé par ce spectacle, oubliant la douleur que provoque la lame de rasoir qui s'enfonce toujours un peu plus dans ma chair. Une immense tranquillité semble s'installer dans mon corps. Mes paupières sont de plus en plus lourdes, mes gestes me demandent de plus en plus de forces. J'appuie la lame un peu plus fort,encore, sentant presque les tendons en dessous. Je veux en finir. Je veux oublier, je veux m'endormir. Pour de bon. Ne plus penser à tout ça. Je m'assois sur le sol glacé de la salle de bain, mes jambes me trahissant. J'ai froid, mais pas à cause du carrelage. Le froid vient de l'intérieur. Un froid mordant. Un froid qui brûle. La naissance de l'Acide. De mon Acide. Puissant. Dévastateur. Je le sens parcourir mon corps. De mon poignet à mon épaule, de mon coeur à mon torse et à mon ventre. Mes intestins me brûlent. Un spasme violent contracte mes abdominaux. Un autre secoue mon bras droit me faisant lâcher la lame. Un regard vers la plaie. L'Acide s'écoule le long de mon bras, de ma main. Puis une main se referme dessus se teintant de rouge, elle aussi. Elle me secoue. Claire est juste au dessus de moi. Je sursaute et regarde autour de moi. Claire enlève sa main posée sur mon épaule. Le salon. Plus de salle de bain.Regard sur la cicatrice. Toujours là. Une ligne blanche qui longe les veines. Des petits points parfois un peu plus gros.
« Tu rêvais Damien. » J'ai du m'endormir dans le canapé. Cela fait plusieurs fois que je m'y endors. La fin précipitée de ma relation avec Julie me fait beaucoup réfléchir. Tellement maintenant que c'est elle que je vois à la place de Suzanne, dans ce rêve récurrent. Julie qui vient me soulever et m'enlever de ma mort à la place de Suzanne. Nous avons été un couple assez bizarre Julie et moi. Deux malades de la vie. Tous les deux blessés dans nos chairs. Son feu intérieur rencontrant mon Acide. Une bête rencontrant un monstre. Au lieu de nous détruire un peu plus, nous nous sommes un peu, comme aidés. J'ai su lui dire ma souffrance et elle a su tout me dire aussi. Alors que cela semble impossible avec les gens qui me connaissent depuis bien plus longtemps qu'elle et bien mieux. Nous avons partagé ça. Une sorte de confiance qui a fait que nous avons pu tout nous dire. Sans avoir peur de la réaction de l'autre. « Tu penses vraiment partir ? » Claire m'extirpe de mes pensées. Elle s'est assise à côté de moi dans le canapé, une tasse de thé à la main. Une autre a été posée devant moi sur la table basse. « Oui. - T'es sûr de ça ? Enfin je veux dire de vouloir ça ? - Sûr et certain. Je dois faire un truc. - Pourquoi tu me dis pas quoi ? Ce serait peut-être un peu plus simple pour moi. Pour me rassurer un peu. - Mais arrête. Ca va aller. En plus, tu ne sais même pas combien de temps je pars. Je ne le sais pas non plus. Ca dépendra de beaucoup de choses. » Claire semble se résigner à ne pas poser plus de questions. Nous en avons déjà parlé, je n'en dirai pas plus. Elle allume la télé et la playstation. « Qu'est-ce que tu fous ? Tu ne vas pas jouer maintenant ? Il est une heure du mat'. Demain t'as cours. - Je sais, papa ! Mais je veux profiter un peu de mon temps avec toi. Alors tu fermes ta gueule et tu prends la manette. A moins que tu n'aies peur en fait que je te bouffe à Burnout... comme d'habitude ! - Non mais, attends un peu. Je veux voir ça que tu me bouffes à Burnout. Je suis imbattable. » Je prends la deuxième manette et rejoins la partie. Claire et moi ne disons rien pendant un petit moment. Puis nous rigolons devant le jeu. Comme frère et soeur sont censés le faire. Comme j'aime le faire avec ma petite soeur. | |
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Tureïs
| Sujet: Re: Fragment #48 - Naissance de l'Acide 02.02.09 5:21 | |
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