Fragment #50 - Silent Night

Quitter cette maison, alors que tout est silencieux. Alors que le sapin éclaire fébrilement la pièce avec ses petites guirlandes multicolores. Je regarde ces mêmes lumières se refléter dans les personnages qui habillent le sapin. J'adore ces jeux de lumières, même si je n'ai jamais été un grand fan de Noël. Je n'ai jamais su pourquoi, mais Noël m'a toujours empli d'une grande tristesse. Je ne sais pas. De voir tout ces gens dans les rues, dans les magasins. Ensemble, ou seul. En famille ou entre amis. Ca me rend étrangement triste. Sofia non plus, n'est pas une fan des fêtes. Plus compréhensible, dans le sens où elle n'a jamais connu sa vraie famille, et que ces fêtes le lui ont que trop bien souvent rappelé. Dans mon sac, son carnet. Une petite peluche qu'elle m'a laissé. Et des photos. Quelques vêtements et des appareils photos. Là où je vais, je ne serai pas si loin que ça de Lille. Mais j'attends beaucoup de cet éloignement, si petit soit il. J'espère y trouver ce que j'y cherche. Et peut-être découvrir un peu mieux ce que je recherche.
Mes mains effleurent les meubles de la maison de mes parents. Le buffet avec l'étagère à bonbons. Le meuble télé avec les portes qui se rabattent sur l'écran. Il n'y a pas de bruit, seulement le tic tac régulier de l'horloge. Je ne compte plus depuis longtemps le nombre de secondes qui se sont écoulées depuis que Sofia n'est plus là. Cinq heures du matin. Je n'ai pas réussi à m'endormir. Je m'assois dans le canapé. Mon père m'amène à la gare dans la matinée. Mon hôte m'attendra à l'arrivée du train. Direction son appartement parisien. Des bruits de pas me sortent de mes pensées. Quelqu'un descend l'escalier. Je m'attends à voir surgir Claire dans le salon. Mais non. Ma mère est là. En robe de chambre. Les yeux cernés.
« Excuse moi, maman si je t'ai réveillé.
- Non. Je n'arrivais plus à dormir. »
Elle s'assoit dans le canapé à côté de moi, en soupirant. Puis le silence retombe.
« Qu'est qu'il y a m'man ? Ca va pas ?
- Je m'inquiète Damien. Dis moi, t'es vraiment obligé de partir ? A Noël qui plus est ?
- Maman, on en a déjà parlé. Je ne reviendrai pas sur mes mots. »
Nous ne disons rien pendant de longues secondes. Puis ma mère continue.
« Et Claire ? Ca ne me rassure pas de la savoir toute seule à ton appartement.
- Elle ne sera pas tout le temps toute seule. J'ai une amie avec qui elle s'entend très bien qui va passer du temps avec elle, assez souvent. Ca ira pour elle. Et puis, je serai là assez souvent finalement. Je n'ai pas quitté l'agence. Je bosse encore pour eux. »
Au fond de moi, une petite voix me dit que je suis quand même un gros connard. Partir pour quoi ? Je ne saurais le dire exactement moi-même. Pas encore. Et puis partir à Noël. Quel fils indigne. Quel frère détestable. Je me tourne vers ma mère et passe mes bras autour d'elle. L'étreinte de ma mère me rassure. Je sais qu'elle m'aimera toujours. Même si j'ai quitté la maison. Même si je la quitte encore une fois.