Bételgeuse
| Sujet: Fragment #66 - Lundi matin 13.04.08 19:12 | |
| Lundi 23 octobre 2006 à Dijon Mes poumons vont exploser, je les sens se gonfler d'air froid au rythme de ma course, et cet air froid les givre, les glace, et finira par les rendre aussi fragile que du cristal. Et quand l'air chaud du bus entrera dedans, le choc thermique les fera exploser, en mille éclats brillants. Ta gueule, Sylvia, cours plus vite au lieu de penser à des conneries! Je halète comme un chien, chienne, comme une chienne, tu aimes ça, hein ? T'épuiser à n'en plus sentir l'oxygène entrer dans tes poumons, juste le battement du sang sur mes tempes, et celui de mon coeur qui accélère. Putain arrête ! Regarde plutôt ce joli ciel gris. Gris... Groumpf, m'en fous du ciel, bordel ! J'aperçois enfin l'arrêt, le bus referme ses portes, il est blindé. Putain personne n'aura l'idée de tenir le bouton « appuyez pour ouvrir » enfoncé ?! Bande de connards. Je le regarde s'éloigner, en essayant de reprendre mon souffle. Les muscles de mes cuisses tressautent, dictés par mes nerfs. Je hais le lundi matin. D'ailleurs je hais tous les matins. Se lever. Se lever le MATIN. Putain mais quelle idée! Ma main tremblante manque de faire tomber mon portable lorsque je regarde l'heure. Bon, il se bouge le cul, le prochain bus, merde?! Il arrive et déjà je SAIS que prendre le dernier bus qui m'amènera à la fac à l'heure est une mauvaise idée. Les portes s'ouvrent, et tant bien que mal je me case entre le bras d'un grand blond, et la hanche d'une petite brune. Je suis en équilibre sur une jambe, manquant de me casser la gueule à chaque ralentissement. Je hais cette promiscuité avec ces corps d'inconnus puant le parfum bon marché. Je suppose qu'eux doivent se dire que je pue le café et le tabac, mais je vous emmerde! Une clope, voilà, il me faut une clope! La porte s'ouvre, mon dos a perdu son appui, seul mon bras m'évite une chute douloureuse. Une crampe s'empare de mon membre salvateur, sa douce chaleur mêlée à ce pincement aigu font se tordre ma bouche. Promis la prochaine fois je me lève plus tôt et je prend un bus moins bondé, mais ne lâche pas, ne me lâche pas maintenant! Le trajet dure une plombe, je descends le plus tôt possible, à l'arrêt Mansart. M'allume une clope, tire dessus comme une droguée. Heum... Ok, la comparaison est bonne, mais ce n'est pas une comparaison. Bordel de putain de merde, on s'en BRANLE, Sylvia, ok? On s'en tape royalement ! Je traverse en plein milieu de la route, l'essentiel est qu'il n'y ait pas de voiture, non ? Lorsque j'arrive à hauteur de l'arrêt des lignes 14-20/21, je finis ma clope, jette le mégot, secoue un peu mon bras endolori, en allume une autre. Mes poumons se rétractent tandis que je monte la petite butte en terre qui raccourcit mon chemin vers la fac. Devant les portes du hall, je balance le mégot juste à côté des pots remplis de sable. Je suis méchante, ça me détend. Je pousse la porte et entre ; ce sera sûrement une journée de merde. | |
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