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 Fragment #111 - Prend ma Main

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Altaïr

Altaïr



Fragment #111 - Prend ma Main Empty
MessageSujet: Fragment #111 - Prend ma Main   Fragment #111 - Prend ma Main Empty10.04.08 18:19

Vendredi 13 octobre 2006
à Dijon

Ca y est. C’est vendredi 13. Il fallait bien que ça finisse par arriver. Hier soir je me suis réveillé vers vingt-trois heure, et j’ai regardé les minutes défiler lentement sur mon portable, et à minuit je me suis dis « voilà, c’est vendredi 13 ». Voilà. Je suis dans le bus, agrippé à une barre métallique pour ne pas tomber, comprimé entre ces deux jeunes filles qui échangent leurs opinions sur un garçon de leur connaissance avec enthousiasme et ce vieux monsieur imposant qui sent le fromage. A chaque arrêt, il m’assène un coup de coude dans le ventre sans s’excuser. Je repense à la douche glacée de ce matin, à la chaleur dégagée par le bus, au vent froid à l’extérieur. Je déteste les vendredi 13.
En cours, je sens les doigts du sommeil entreprendre un massage soporifique sur les traits de mon visage. La fatigue m’enveloppe doucement et mon attention décroît. J’ai cessé de prendre des notes car ma main ne m’obéit plus, et mon cerveau doit lutter pour garder mes yeux ouverts. Mais mes paupières sont lourdes… « Monsieur Mahogany, s’il vous plait, revenez parmi nous je vous prie. » Tous les autres se retournent sur moi, braquant sur mon être leur sourire électrochoc. C’est ça, moquez vous de votre dieu, bande de sous-merdes. De toute façon, je suis trop lessivé pour vous châtier ces derniers temps. Je déteste les vendredi 13.
Je remonte dans le hall de la fac droit-lettres, un sandwich sans goût dans la main, quand soudain, alors que je commençais à l’oublier, la revoilà, ma belle Lola, l’air complètement perdue, essayant de déchiffrer les grands panneaux décrivant la configuration du labyrinthe. Je peux voir ses cheveux très bruns, ils sont là, si près de moi. Nous ne sommes qu’à quelques mètres l’un de l’autre, mais je n’ose plus bouger. Il y a cet embrasement dans mes jambes, qui remonte et se propage dans mon ventre, instantanément, le voilà qui gagne ma poitrine et s’enflamme, mes mains deviennent moites, des sueurs de feu qui imprègnent ma peau. Elle tourne son visage désespéré vers moi, et soudain s’illumine. Nous nous approchons l’un de l’autre.
« Salut… me dit-elle timidement. C’est Julian ton prénom, c’est ça ? »
Je souris. Elle se souvient de moi…
« Et toi Lola, dis-je en guise de réponse. »
Sourire échangés. Regards qui se fuient en cherchant à se retrouver. Peut être que je lui plais aussi, finalement… Elle m’explique qu’elle ne retrouve pas sa salle, je lui propose de l’aider. Elle refuse poliment, m’expliquant qu’elle arrivera en retard maintenant. Alors je sens le feu prendre le contrôle de mon corps.
« Suis-moi. »
Ma main s’empare de la sienne, et je l’entraîne avec moi, d’escaliers en escaliers, de couloirs en couloirs, dans ce dédale que je connais si bien maintenant. Je ne suis plus que flamme, je sens à peine le contact de sa main comme de la soie entre mes doigts. Elle est là, derrière moi, elle me suit, et notre course effrénée efface les gens autour de nous. Les images et les sons explosent comme un feu d’artifice dans mon champ sensoriel. Nous voilà presque arrivés, je la dépose devant sa salle. Il faut que je te quitte, maintenant. Tu ne dis rien, tu ne sais pas quoi dire. Moi non plus d’ailleurs. Ne sois pas si rouge ! Est-ce que je suis écarlate moi aussi ? Ne dis rien, tes yeux noirs et brillants me crient « merci », je le vois bien, ne dis rien. Je veux continuer à entendre le tambour de mon cœur.
Elle entre dans sa salle, la porte se referme. Autour de moi, les contours du monde se redessinent progressivement, comme si j’émergeais d’un songe. Je croque dans le sandwich sans goût qui, désormais, est devenu délice. J’adore les vendredi 13.
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