Fragment #4 - Reprise en main.

Un mois est passé depuis le départ d'Hannah et ma vie n'est plus qu'un immonde tas d'idioties. Je me réveille ce matin et je suis glacée . Comme tous les matins de cet hiver plus que froid. Hier soir la température avait atteint les -18° C. Je me lève en enroulant les draps autour de moi, me dirige vers le minuscule évier et tourne le robinet... Rien ne coule. Ça ne m'étonne pas. Comme chaque année, les canalisations sont gelées dans ce putain de grenier. Il faut vraiment que je me sorte de cette galère. J'attrape mon téléphone portable et désactive le mode silencieux. Le petit écran s'illumine et je vois clignoter des appels manqués. "Inconnu", mon coeur s'emballe, et si c'était Hannah?? Un mois sans nouvelle d'elle, je commençais à m'y faire. Les souvenirs affluent dans mon esprit. Je continue mon investigation et découvre un texto, bref mais intense. "Je t'aime, ne m'oublie pas. Je fais ce que je peux. Je.." Le message s'arrête là, l'a-t-on surprise? Ma gorge se resserre et je laisse tomber mon portable sur ce matelas miteux qui me serre de lit jours après jours depuis près de deux ans. J'attrape un pull, le moins miteux que j'ai, un énorme col roulé bordeaux, cintré et un jean, pas trop délavé. Aujourd'hui c'est décidé, je me prends en main. Marre de me farcir ce vieux porc de Stanley juste pour une douche chaude et une soupe le soir.

J'attrape mes clopes, mon blouson et file dans la cage d'escalier. Quand Hannah reviendra, je serai prête pour elle. Ce boulot j'en ai besoin coûte que coûte, j'en ai besoin.
Je claque la porte de l'immeuble et relève le col de ma veste. Le froid glacial s'insinue dans mon corps faible jusqu'à aller percuter mes os. Qu'importe, aujourd'hui c'est mon jour et je saisis ma chance. Après tout, j'ai un diplôme en poche, il suffit que je me démène pour trouver un boulot!
Je descends la rue Rosa Luxembourg d'un pas vif et arrive enfin dans le centre de ma petite ville natale. Où se trouve l'office de l'emploi déjà? Ah oui, à gauche là-bas...
Je pousse la porte et, heureuse de me faire envelopper par cette agréable chaleur régnant dans la pièce, je m'installe sur un fauteuil en attendant que l'on s'occupe de moi. Quinze minutes et deux cigarettes plus tard, une jolie jeune femme s'approche enfin de moi. Un peu plus et je m'en allais. Je me lève et lui tends la main.

- "Louisa Flew, enchantée"

La jeune femme me détaille d'un œil et me sourit finalement, serrant ma main dans la sienne si douce. Un frisson me parcoure rapidement.

- Hélèna Pipodi, que puis-je faire pour vous?

Je la détaille tout en l'informant de ma situation, ses cheveux blonds sont relevés en un chignon serré, elle porte un tailleur (mais jupe, pas pantalon) beige qui lui va bien au teint. Des hauts talons et des jambes qui n'en finissent plus. Pendant que je parle elle m'emmène dans son bureau, me fait assoir sur un siège et elle s'appuie elle-même sur son bureau.

Elle me scrute du regard et je me sentis rougir sous tant d'attention.

- Quel diplôme possédez-vous?

- J'ai terminé mes études pour être enseignante, en secondaire. En tant que professeur de français mais uniquement dans l'inférieur du secondaire.

- Je vois, et là il vous faut un travail le plus vite possible, si j'ai bien compris votre situation?

- Oui, c'est cela-même.

Hélèna me sourit et se redresse.

- Et bien, Mademoiselle Flew, je vais faire ce que je peux pour vous. Il vous suffit de me laisser vos coordonnées ainsi qu'une copie de votre diplôme. Je vous appellerai lorsque j'aurai du nouveau mais je vous mets en haut de la pile.

Je me lève et lui serre chaleureusement la main.

- Je vous remercie, ma situation commençait tout doucement à devenir critique! Merci beaucoup.
Je fais quelques pas vers la porte et me retourne une dernière fois vers elle.
- Aurevoir.

J'ouvre la porte et disparais.