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 Fragment #558 – Hôtel Mahogany

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Altaïr

Altaïr



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MessageSujet: Fragment #558 – Hôtel Mahogany    Fragment #558 – Hôtel Mahogany  Empty30.08.10 13:19

Dimanche 29 août 2010
à Paris
Mon esprit émerge de la nuit, et aussitôt la peur se dépose dans mes yeux, la peur de la réalité, la peur de notre condition que nous oublions en rêve. Aussitôt me reviennent les ombres et les froids, la perspective des épreuves à passer, l'âcre solitude. Je repense à Lily, à ses cheveux roux, à Sylvia. Mes pieds caressent les draps. Je dérange un peu Sa Majesté, roulé en boule à côté de moi. Le voilà qui ronronne, bien gras et soyeux, et sa queue touffue balaye mon visage. Mes doigts glissent sous l'oreiller et le pressent avec force. Je me baigne dans l'odeur impeccable de la lessive. Au-dessus de ma tête, les moulures blanches transfigurent le plafond, je me perds dans leur contemplation comme dans les constellations. Notre immeuble était un hôtel ancien, un de ces bâtiments qui font le charme de Paris. Souvent, les premiers temps, j'aimais changer de chambre chaque nuit pour me dépayser, et puis l'habitude a altéré l'excitation de ce jeu. Je me suis fixé au deuxième étage. Ma fenêtre donne sur la rue et je suis loin des autres. Je sais que Florian aimerait relancer l'hôtel, mais ni Lilian ni moi ne voulons voir passer des inconnus dans ces couloirs que nous aimons, coucher dans les chambres que nous avons rencontré et aimé, et passer à côté de nous en nous dévisageant, sans jamais se douter que tout cela est à nous, cet organisme de pierre et de bois, ces épais tapis rouges, moelleux et bordés d'un liseré de fil d'or, qui étouffent les sons de nos pas sur le parquet ancien, ces lambris noirs où les lustres suspendus agitent des grelots brillants, ces portes mystérieuses, toutes marquées d'un numéro d'argent patiné, qui s'ouvrent sur des pièces ayant chacune leur personnalité, ces fenêtres hautes et leurs rideaux qui sont comme des chevelures de tissu, ces salles de bain silencieuses. Je sais que Florian a déjà entamé ses recherches, il va recruter un réceptionniste et un garçon d'étage, peut-être plusieurs (je ne sais pas, je n'ai pas envie de m'en occuper). Il a déjà peaufiné le site web, « Hôtel Mahogany ». Tout ça n'est plus qu'une question de semaines, avant que des clients ne débarquent sous notre toit. Pour ma part, je suis trop occupé par le Nouveau Clan pour me soucier de ça.

Dans la cuisine, Florian et Maura petit-déjeunent en lisant le journal et en écoutant la radio. Je me sers une tasse de ce café roux et sirupeux, préparé par ma belle-sœur (bien loin du nectar amer et noir que je me confectionnais avant de vivre avec eux). Enki revient du salon avec deux bol vides qu'il dépose dans l'évier, il me dit « bonjour tonton » et je lui réponds « bonjour mon neveu », son père lui demande si Léa a bien fini son lait et Enki confirme avant de retourner devant la télé. Je regarde ce petit tableau familial, dont les membres décomposés se sont assemblés récemment et se soudent chaque jour davantage, et où chacun est une pièce rapportée. Je songe un instant à ma propre famille, celle que j'aurais pu bâtir avec Lola mais pour laquelle je n'étais pas prêt, les deux enfants qui grandiront à ses côtés et qui sont issus de mon sang. Et puis je pense à Lilian, Lilian dont je ne sais plus rien, Lilian qui vivra seul peut-être tout sa vie car le monde n'est pas fait pour lui. Je me souviens de mon petit frère tel qu'il était avant, puis du rayonnement qui le métamorphosait, après sa rencontre avec Robin, et enfin, après l'accident, les insondables ténèbres, le masque grimé, sulfuré, griffé. Je regrette que la vie ne nous ait jamais autant séparé, et qu'aucun pont ne puisse tomber entre les ravins qui détachent nos cœurs et nos âmes.
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