Bételgeuse
| Sujet: Fragment #139 - Sur la route 13.04.08 20:48 | |
| Lundi 21 janvier 2008 quelque part entre Lyon et Dijon Pisser dans des toilettes d'autoroute m'a toujours dégoûtée, alors je cherche un arbre derrière lequel me planquer. En même temps, il fait nuit. L'air froid contre mon cul, le filet de pisse qui glisse sur l'herbe clairsemée. J'allume une clope en marchant vers la voiture. Le mec qui m'a pris en stop est assez jeune, bizarre mais sympa. Max a les yeux noirs, et la peau mate. Je l'ai trouvé à Grenoble, alors que je faisais un tour en ville. Je ne sais même plus pourquoi on s'est mis à parler. Je lui ai dit que j'étais là depuis plusieurs jours, et que je cherchais quelqu'un pour m'emmener à Dijon. Avant ça... J'étais à Avignon. C'est une meuf trop cool qui m'a conduit à Grenoble. Entre Montpellier et Avignon, j'ai du sucer un vieux qui sentait la sueur. Perpignan/Montpellier, un mec pas très net ; il devait m'emmener directement à Grenoble, mais il me faisait tellement peur que j'ai profité d'une aire d'autoroute pour me casser. Des visages, des odeurs, des voix que j'oublierai vite et qui pourtant font partie de ce moi qui est là aujourd'hui. J'ai cette impression qui me noue les entrailles en arrivant sur le parking ; pas loin, un bruit de moteur ronronne dans ma chair. Et la Clio blanche qui s'éloigne sur l'autoroute. Fuck. Il fait nuit, il fait froid ; la voiture démarre, et je sais que je ne reverrai pas mon père. Les larmes se pressent à mes yeux. Il est 2h du mat', je suis coincée quelque part entre Lyon et Dijon, et il n'y a personne aux alentours. J'agite la main pour lui dire au revoir, il ne répond pas. Alors ma gorge se noue, et mon estomac se serre. L'acidité remonte entre mes dents. Je ne compte même plus depuis quand je ne me suis pas lavée. Merde ! Mon sac ! Il était dans le coffre. Mes fringues, la montre... Une vague de désespoir m'emplit les poumons, et je pleure vraiment. Connard ! Putain quel connard ! C'est pas possible, je vais me réveiller. La voiture disparaît de notre rue, et un spasme me fait vomir à l'endroit même où il était garé. A travers le rideaux de larmes, je fixe la place de parking ; et dans l'obscurité, j'aperçois une forme noire. Ce putain de salaud m'a laissé mon sac. Le poids se soulève de ma poitrine ; après tout, j'ai déjà été dans des situations merdiques. Et j'ai encore la montre. Je la retrouve entre deux jeans. Elle est froide et lourde, et la chaîne qui s'enroule autour de mon poignet me sourit tendrement. Et le cadran me murmure que je suis sur le chemin. | |
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