Altaïr
| Sujet: Fragment #298 - Est-ce que cela est réel ? 13.04.08 21:45 | |
| Mercredi 3 octobre 2007 à Dijon La jeune nymphe s'approche du monstre aux multiples tentacules. Elle tend une main en direction de la bête qui convulse et de l'eau jaillit dans sa direction. Comment est-ce qu'elle fait ça ? Comment peut-elle contrôler l'eau avec ses mains ? Le monstre agite ses tentacules, et la jeune fille se protège derrière ce qui semble un bouclier d'eau, une bulle qui se dresse et la protège contre toute attaque. Son double la rejoint. Ensemble, elles pénètrent à l'intérieur du monstre et disparaissent hors de ma vue. Je vois la bête noire qui s'agite un moment, son hurlement est si puissant que je dois plaquer mes mains sur mes oreilles, si puissant que je tombe à genoux et que mon corps se tord de douleur. Puis c'est l'explosion. La créature se dissoud dans l'air, anéantie. Alors il ne reste plus rien que le lac, le soleil qui se reflète sur l'eau, et le chatouillis des petites vagues sur la plage de cailloux. Je me redresse en m'appuyant sur le sol. Mes doigts pressent l'herbe fraiche. Toutes ces sensations si précises... Ca ne peut pas être un simple rêve. Il me semble que j'ai déjà vécu pareille situation, mais quand ? Est-ce que je rêve que je rêve ? Et où est Déborah ?
Soudain il y a comme une déchirure dans l'air à côté de moi. Quelque chose apparaît. Je vois une silhouette se matérialiser, celle d'un homme. Peu à peu ses traits se dessinent ; je connais ce visage. Il se tient face à moi. Nathan, Hypérion, l'homme au masque de métal. La Fourche piquetée sur sa tempe semble pulser. L'Oeil sur mon coeur y répond d'un même battement. Qu'est-ce qu'il fait là ? Est-ce que cela est réel ? « Salut, dis-je, tu m'as fait peur. - Ca fait un moment que je te cherche. - Ah ouais ? Mais on est où là ? Je sais même pas si je rêve ou pas, ça m'a jamais paru si réel... - Tu en es sûr ? » Non, souviens-toi Julian, souviens-toi du Labyrinthe et des serpents de feu, souviens toi d'Anubis. Souviens-toi de la cour intérieure et du reflet de Jed... « Le problème, reprend Nathan, c'est que je sais pas si tu es réel ou pas. Et j'ai aucun moyen de le savoir quand on est ici. - On est où, exactement ? - Dans un rêve. Mais ça n'est ni le tien, ni le mien. Il se distord et se répète inlassablement depuis des semaines. - Hein ? Mais comment c'est possible, ça ? - On est des Constellés, Julian. La drogue canalise tout ça. Quand tu es éveillé parfois, tu as l'intuition de ce monde. C'est ton inspiration. - C'est comme ça que tu sais toutes ces choses sur nous ? Tu entres dans nos rêves ?! - Ouais, ça m'est arrivé. - Merde, te fous pas de moi, ça n'existe pas tout ça, c'est des conneries. - Si tu veux, de toute façon je suis ici tel que je t'apparais. Quand tu te réveilleras, tu pourras penser ce que tu voudras. Soit ce qui sort de ma bouche est le fruit de ton inconscient. Soit c'est vraiment ma bouche, ma volonté de parler, qui s'articule et s'exprime à l'intérieur de ton inconscient. - LA FERME ! Ca ne peut pas être vrai ! Ca ne peut pas exister ! - Cet endroit n'est rien, mais il existe, Julian. D'abord il y a eu Jed, le loup-garou, et je l'ai retrouvé par internet pour apprendre à mieux le connaître. Et puis il y a eu toi, alors j'ai demandé à mon cousin et à sa petite amie de t'amener avec eux jusqu'à moi. La boîte t'a lié à Jed. Ensuite j'ai repéré Léopold et ses rêves si particuliers. Je lui ai donné vos adresses msn. Ensuite j'ai trouvé Lola, mais j'étais à Dakar et je lui ai envoyé un colis. Et puis Alexandre, dont je connaissais la soeur, et à qui j'ai fait parvenir le briquet. Tu connais Laura, pas vrai ? Enfin il y a – non, laisse tomber. - Quoi ? Si, dis, vas-y. C'est qui, un autre « Constellé » ? - Laisse tomber. - Tu me fais chier. J'en ai marre que tu fasses ça, me laisser dans ce flou artistique, sans jamais m'éclairer. Tu viens, tu balances des trucs, et tu te casses. Et là t'es où, à Dakar ? Merde, Nathan ! - Je reviendrai pas. - Mais pourquoi ? Pourquoi tu es là-bas ? » Nathan se renferme. Il regarde le lac, là où la fille se tenait tout à l'heure. J'essaye de me calmer un peu. La colère vibre en moi comme si j'étais éveillé. Elle est presque « trop » vraie. « Il y avait quelqu'un dans le lac avant que tu n'arrives. Déborah. C'est une Constellée, elle aussi ? » Nathan hausse les épaules. Je hais ce mur d'airain sans réponse. « Comment je peux le savoir ? Aide moi ! - Les rêves donnent des pistes. Si tu veux savoir, cherche les symboles. - Les symboles ? Quels symboles ? » Il lance un regard à mon coeur. Là où l'Oeil s'étend en neuf petits points. « Merde Nathan, à quoi tu joues bordel ? La boîte, le briquet, le colis de Lola... Et pas moyen de savoir si c'est réel ou pas ! - Quand tu es éveillé, est-ce que tu es certain de ne pas rêver ? - Ca me donne le tournis... De quoi est-ce que je peux être sûr alors ? - De rien. De tout. Qu'est-ce que ça change ? T'as vraiment besoin d'être sûr pour vivre ? Le Secret n'a rien à voir avec ta plume et ton scalpel. Ecoute, on est dans la Nébuleuse. Ici on peut passer de rêves en rêves. - Le temple d'Anubis... - Anubis, c'est TON fantasme, TON cauchemar. Le labyrinthe, lui, est bien réel. - Réel ? - Façon de parler. Il recoupe plusieurs rêves. Le tien et celui de Jed entre autre. Dans le labyrinthe de Jed, il y a un Minotaure. C'est SON cauchemar. Chacun a ses monstres. - Je suis pas sûr de tout comprendre, Nathan. - Désolé, j'ai pas beaucoup de temps. J'ai des choses à faire à Dakar et je voudrais pas qu'Ils nous trouvent. - Ils ? C'est qui ? - Pas le temps de t'expliquer. Fenrir est captif dans le temple du désir. Mais on peut pas y aller pour le moment. Cherche les autres symboles, et rassemble-les. - Les autres symboles ? - Le Sablier, la Fourche... Des points qui nous séparent des autres et font de nous les Constellés. Rassemble-les. Trace des traits entre les points. Relie. » Nathan sort de la poche de son blouson une sorte de boussole en métal et y jette un regard inquiet. « Il faut partir, dit-il. » Mais déjà, un homme se tient non loin de là. Un homme vêtu de noir. Derrière lui il y a quelqu'un d'autre. Un autre homme en noir avec de grosses lunettes de soleil. Ils ne bougent pas. « Messieurs Nathan-Paul Durand et Julian Mahogany ? » La voix vient de partout à la fois. Je sens mon coeur pulser de plus en plus fort. Nathan a côté de moi, disparaît. Alors je ferme les yeux... ... et j'émerge de mon rêve. La sueur inonde mes draps. Je m'empare de mon téléphone, compose le numéro de Lola. Merde, il est 4h du matin, elle ne répond pas. « Salut Lola, c'est Julian, je suis désolé de t'appeler à cette heure là mais... Non, je sais pas, c'est des conneries. Je voudrais savoir si tu as des nouvelles de la fille là, Déborah. J'ai un pressentiment bizarre. Et puis y faudrait qu'on se voie, un de ces quatre. Assez vite même. Toi, moi, et les autres. J'attends de tes nouvelles. Bisous. » Je raccroche. Merde, elle m'avait envoyé un sms, et dans ma précipitation, je ne m'en étais pas rendu compte. Ca y est ! Déborah s'est réveillée ! Je suis àl'hôpital avec elle. Tout va bien. A bientôt. Lola. | |
|