Mardi 6 février 2007
Dijon
Mes mains sont engourdies par le froid paralysant, mes doigts dansent avec la pelure orange qui glisse et se transforme. Les quartiers se dévoilent dans toutes leurs couleurs criardes, encore enrobés d’un fin manteau qui les tient au chaud. J’en prends un et le donne à Manon. On les entendrait presque crier. Je vois la chair à vif éclater entre les dents acérées. Je ressentirais presque dans ma bouche la chair céder faiblement et le jus se répandre dans mon arrière gorge. J’en ai presque le goût amer qui m’envahit les papilles. A mon tour maintenant. Tout est répété et actualisé, je sens le jus sucré envahir ma bouche et les pépins jouer avec ma langue. J’avale tout.
« Tu en as un peu au dessus des lèvres »
Jed est tout à coup fragile et perdu, il s’essuie les lèvres sans parvenir à atteindre le bout de chair qui s’attache à lui et ne veut plus s’en aller.
« Attends. »
Elle m’embrasse sur les lèvres pour nettoyer ce morceau de clémentine récalcitrant.
« Arrête, s’il te plait.
- Qu’est ce qu’il y a ? Tu n’aimes pas?
- Ce n’est pas ça. C’est que… »
Elle m’embrasse à nouveau.
Nos salives se mélangent. Je l’étreins un instant. Je sens mon intimité se raidir sous ses baisers.
« Désolé Manon, il faut que j’y aille. »