Fragment #11 - De Vénus à Mars

Début de matinée chaotique, je ne suis pas d’humeur sociable. François n’a toujours pas appelé. J’évite les appels incessants de Marc depuis hier. Je ne veux pas lui parler tant que je serai dans cet état. Il faut que je me ressaisisse. Pour cela, crever l’abcès, parler avec François. Je vais l’appeler. Je décroche le combiné et compose le numéro que je connais par cœur depuis le premier jour où je l’ai rencontré. Je tombe sur son répondeur. Je raccroche. Je ne veux pas lui laisser un message sur une machine qui ne me répondra pas. Bon, je vais lui envoyer un email. C’est la meilleure solution, il faut juste que je pense à mettre l’accusé de réception pour savoir quand il l’aura ouvert.

De : Camille
A : François T.
Date : 23 août 2006 15 :25
Objet : Mars et Venus

François,

Il faut que ça cesse. On se fait du mal. Depuis notre dernière discussion, je ne suis pas bien. Je ne veux pas que les choses se terminent comme ça entre nous, je ne veux pas que les choses se terminent tout court. Tu es celui en qui j’ai le plus confiance et je sais que nos destins sont liés. Malheureusement, au jour d’aujourd’hui notre relation n’est pas possible tout simplement car 6000 km nous séparent. On arrive plus à se parler sans se faire du mal et tu ne me comprends plus car tu ne lis plus dans mes yeux ce que je ne sais dire par des mots. Venus et Mars ? Un océan s’est glissé entre nous et quand on dit que l’amour franchit des montagnes, je me dis que l’amour ne doit pas savoir nager. Je t’aime toujours et je t’aimerai toujours. Quand je te dis que j’ai couché avec un autre homme, c’est surtout pour te permettre d’avancer. Il faut que tu passes a autre chose, que tu trouves une fille, une parisienne un peu bobo, un peu gauche caviar que tu emmèneras en week-end en Normandie. Je ne veux pas que l’on prenne de la distance, je veux pouvoir t’appeler pour te raconter ce qui se passe, pour te dire que ma boss est toujours aussi folle, que j’ai trouvé une paire de chaussures ou que j’ai dîné dans tel ou tel endroit. Je veux qu’on reste ami à défaut d’être amant. Je sais que cela ne sera pas facile et donc si tu penses que tu as besoin de temps, on peut ne plus se parler pendant quelques temps. Tu vas clairement beaucoup me manquer si on fait cela mais je ne peux t’imposer de faire ça.
J’attends ton email. Je t’embrasse comme je t’aime,

Camille.

Je relis le mail encore, pour la dixième fois. Je ne suis pas sûre de l’envoyer pourtant ça serait la solution. J’aimerais lui crier mon amour, mais c’est lui qui a fait le choix de ne pas venir. De toute façon, ma vie est ici. Bon allez, j’envoie. Je clique sur le bouton « send » et mon mail s’envole. Les données se changent en signal électrique et courent comme un ancien messager a travers les câbles a fibre optique. Un océan, une montagne, rien n’empêchera mon signal de rejoindre l’ordinateur de François. Si seulement mon amour était identique. Une enveloppe s’affiche sur mon écran. Un nouveau message de François. C’est un auto-reply, il n’est pas au bureau pendant 15 jours…