Dimanche 29 juin 2008
à Dijon
Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas retrouvé Dimitri dans ce parc. Vraiment longtemps. Le ciel est clair, les arbres sont verdoyants. Pourtant j'ai froid. J'ai froid à la vue de ce Dimitri à l'air complètement anéanti. J'ai froid et j'ai peur. Peur de ne pas pouvoir l'aider. Exactement comme avant... Je pensais être devenue plus forte depuis mon accident, mais finalement, rien n'a vraiment changé. Je lance les dés, double six, retour à la case départ. Le grand jeu de la vie se joue de nous. Nous sommes ses pions, sur un gigantesque plateau de jeu, dont les bords sont tellement distants que l'on ne peut les apercevoir, ni même les imaginer. Alors on se contente de suivre les indications des cases sur lesquelles le hasard nous a jeté. Et puis, il faut lancer les dés, et espérer.
« Dimitri comment tu vas ? »
Je n'ai rien trouvé d'autre à lui dire. Evidemment, il ne va pas bien, mais que puis-je dire d'autre ?
« Michelle est morte. Et toi ? »
Le froid s'infiltre en moi et fait craquer ma peau. Pourquoi ? Pourquoi est-ce que tu ne me laisse pas t'aider ? Laisse moi te parler. S'il te plaît.
Comme si j'avais pensé tout haut, Dimitri tourne ses yeux vers moi.
« Tu travailles toujours au Dionysos ? » Tout en posant la question, je fixe Dimitri, espérant déceler un signe, une chose sur laquelle je pourrais m'appuyer, afin de le sortir de ce désert de glace et d'ombre. Dimitri, les dés sont jetés, c'est à toi.
Je descends du bus au niveau de la place Grangier. Pendant tout le trajet, je n'ai cessé de repenser à ma discussion avec Dimitri. Même si discussion est un bien grand mot, nous avons tout de même réussi à échanger quelques paroles, faisant fondre une partie de la glace. J'arrive devant la librairie Privat. Il n'y a personne, le rideau de fer est baissé. Nous sommes dimanche, c'est vrai. Je m'assoie sur un banc non loin de là et observe les rues désertes. Je reviendrai l'acheter demain... L'écume des jours.
Je reste encore assise ici un long moment, laissant s'égrainer les minutes de cette nouvelle journée. La journée où le glacier s'est changé en torrent de larmes. Je jette un oeil sur ma manche gauche. Les taches d'eau qu'y a laissé Dimitri se sont évaporées.