Dimanche 24 août 2008
à Plombières les Dijon
4h37. Melissa mon ange, tu dors comme un bébé. Entre mes draps, si loin de mes bras. Je te regarde pendant que les pages se chargent. L'Agartha et Lilian m'ont réveillé. Où plutôt ils m'ont empêché de dormir plus longtemps que le premier sommeil dans lequel toi et tes caresses m'avaient plongé hier soir. Tu es belle. Melissa mon éternelle.
Je pianote sur mon ordinateur à la recherche de renseignements sur l'Agartha. C'est un monde souterrain... grand réseau de galeries... ouvertures changeantes... monde imaginaire. Je me suis peut-être emballé, je ne crois pas qu'on trouvera d'indice assez précis sur Internet pour trouver ne serait-ce qu'une des multiples entrées de ce monde parallèle s'il existe. S'il existe. Lilian doit avoir raison, mais il fallait se lancer c'est notre seule piste pour le moment.
À force de ne rien trouver je mets l'ordinateur en veille et éteins l'écran. Je tourne sur la chaise de sorte de n'avoir que Melissa en ligne de mire. Sa peau cuivrée sur mes draps clairs est un morceau d'or dans un coton. Elle dort d'un sommeil de plomb, et je m'émerveille de sa beauté. Je la regarde dormir, respirer. Immobile. Son souffle léger dans la pénombre est presque la seule marque de sa présence. Car en fait je la regarde sans la voir depuis que l'écran est éteint et qu'il n'inonde plus la pièce de sa lumière. Je la devine, je la découpe, je l'imagine à la loupe. Petite étincelle au parfum d'août. J'espère que de mon amour en ce moment tu ne doutes, il est trop grand pour te le montrer, ne t'y perds surtout pas. Je t'aime.
Par peur de l'user à trop la regarder, je vais, fermant les yeux, me blottir contre elle, la sentir contre moi. Nous n'avons plus que cette journée à passer ensemble avant de devoir attendre le week-end prochain pour nous retrouver. Je n'aime pas tes horaires, ni ton boulot qui se sont ligués pour m'empêcher de te voir à loisir.
Nous sommes deux dans cette chambre bleue, nous ne faisons qu'un sur ce lit sans baldaquin, et un jour nous serons trois, puis quatre et peut-être cinq ; j'espère. Avant cela tu auras terminé tes études, et moi je travaillerai pour nous faire vivre.
Quel peintre n'a jamais rêvé d'amour sur ses toiles ? Je veux peindre mon amour dans son cœur, être l'artiste amateur et solitaire de sa peau, ressentir ses frissons et porter en moi ses doutes qui gouttent en elle. Quel tableau ne respire pas la passion ? Je veux l'éprouver, mes sentiments les lui prouver. Peinture à l'eau sur les couleurs ternes de ma vie. Peinture à l'huile sur les sentiments violents de mon cœur. Gravure inscrite dans ma peau, sur le galbe de son corps.
Je t'aime peint en toute lettre sur ce tableau. Celui où des corps sont décors, celui où la mère amère noie son chagrin dans le froid et la faim, celui où comme un bleu je suis amoureux de la plus belle fille du pays par un amour sans détour. On le voit dans les yeux des personnages, dans leurs gestes figés, dans leurs couleurs altérées, dans leur encrage sur la toile. L'encre de chine coule sur les esquisses. L'oeil observant la chute du liquide, remonte le flot ; on aperçoit la plume qui vient heurter l'encrier, le pot tombe. J'ouvre les yeux.
J'ouvre les yeux, il fait jour. Melissa me regarde. Les bras autour des genoux elle est assise sur le lit un livre dans les mains. Elle m'embrasse. Je suis son peintre, esclave des couleurs de son amour.