Aldébaran
| Sujet: Fragment #6 - Sensualité 09.04.08 22:01 | |
| Mercredi 7 juin 2006 à Chenôve Un peu d’eau froide. Beaucoup d’eau chaude. Je suis dans mon cocon aquatique. Sous la douche. Enfin. Douche que j’attendais depuis ce matin huit heures. Mais les révisions, elles, n’attendent pas. Ni l’inscription d’ailleurs. Inscription au bac. Une ineptie de plus. S’inscrire pour un concours qu’on n’aura pas, de toute façon. Il pleut sur mon corps. L’eau tiédit. Puis devient chaude, et brûlante. Je ne me sens plus. Et c’est là que je suis bien. Je suis pur esprit entremêlé aux tronçons bouillonnants d’eau sous pression. Mon corps en cage. Mon esprit s’envole. C’est sous la douche que les idées me frappent. Et pas de carnet pour noter là-dessous. Rien. Mon corps seul face à lui-même. Je m’inspecte dans tous ses recoins. Oh, corps, toi que j’adore. Fournisseur de sensations infinies. Extase des sens continuelle. Grâce à toi. Je t’aime. Je t’aime toi l’eau sur mon corps ; toi la fuyante ; toi la perverse. J’aime quand tu me caresses dans tous les sens, par tous mes sens. Tu ondules sur mes épaules, coule le long de mon dos, escalade mes fesses, retombe le long de mes cuisses, effleure mes pieds. Pour partir dans l’évacuation. T’enfuir, tourbillonnante. Le côté face, c’est encore mieux. J’aime quand tu me gifles le visage. Tu es féminine ; tu l’as toujours été. Trouble, douce ; violente tout à coup. Brûlante puis glacée en un instant. « Maman ! Je suis sous la douche, arrêtes la vaisselle ! » Elle ne m’entend pas. Incompréhension habituelle. Je passe du gel douche sur mon visage d’abord –je nettoie mon pare-brise, la carrosserie que tout le monde remarquera. Puis sur mes épaules et sous les bras –sentir bon en premier lieu. Puis je caresse mon intimité –être beau, toujours ; être prêt surtout ; au cas où. Parer à toute éventualité. J’ai toujours marché comme ça. Brossage de dents. Tout est en règle. Maintenant je peux profiter de ma douche. Je m’accroupis. Cocon au ras du sol. Mes fesses sur mes talons. Mon visage contre mes cuisses. Mes mains entourent mes genoux. Et je rêve. Enfin je suis bien. Pour un instant de bonheur. Pour un instant d’extase. L’eau m’est charnelle. L’eau m’est vitale. Pour moi, rien n’est plus sensuel qu’une douche. Si ce n’est une bouche. Mais tout a une fin. Surtout le plaisir. A peine commencé qu’il est déjà fini. Je me sens vide tout a coup. L’eau s’est arrêtée de couler. Ma main crispée sur les robinets. Je goutte. Je tire le rideau. Force régénératrice. La serviette dans mes mains ; puis autour de ma taille. Je me tourne vers le miroir. Buée. Je suis flou. Je suis bien. | |
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