Fragment #460 - Les collocataires

Le garçon n'a pas voulu de moi. Alors je me suis réfugié chez Juliette, dans son appartement rue Oberkampf, dans le 11ème Arrondissement. Nous avons changé d'heure ensemble. C'est cool, le changement à l'heure d'hiver : ça permet de dormir le matin une heure de plus.
Juliette, elle est en collocation avec un grand type bizarre, Sergueï Novotny, un russe qui a vécu à Saint-Pétersbourg et qu'elle qualifie d'ex-meilleur ami en redevenir. Elle m'a accueilli à bras ouvert, comme si de rien n'était, comme si rien ne nous avait séparé depuis la fin du mois de juin. Ca va presque faire quatre mois, pourtant. Est-ce que tu travailles toujours à McDo ? Oui ? Tu es même devenue manager ? Quelle horreur, ma pauvre Juliette, te voilà esclave de ce système alors.
« Oui, mais maintenant je peux martyriser les nouveaux, c'est assez cool. »
J'imagine. J'imagine, ma Juliette. Et Goran, alors ? Qu'est-ce qu'il est devenu ? Aucune nouvelle ? Tu ne sais même pas s'il est rentré sur Paris ? C'est bizarre. En même temps on s'en fout, de ce connard de croate. Qu'il reste dans son pays et qu'il nous foute la paix.
« T'es gay ? me demande Sergueï.
- C'est important ? je réponds en crachant un nuage de fumée de cigarette.
- Ouais, moi je veux savoir.
- Je suis bi, je réponds, ça ouvre les possibilités.
- Ok, actif ou passif ? »
Je regarde alternativement Juliette et Sergueï, un peu stupéfait.
C'est qui, ce mec ?
« Au fait Ju', tu te réinstalles sur Paris ? me demande Juliette.
- Ouais, c'est bien parti pour.
- Et tu cherches un appart ?
- A moins que tu m'héberges pour une durée indéterminée, ouais.
- Ben justement, Sergueï et moi, on cherche un colloc... »