Fragment #7 - Faim

Le parisien (édition régionale), mardi 23 décembre 2008.
" Le corps d'Olivier Monsant a été retrouvé par les éboueurs lundi 22 décembre, à cinq heures du matin, près des poubelles de tri du quartier Saint Maurice. Les organes génitaux étaient broyés, le coccyx fracassé. Le crâne a été pulvérisé et réduit à l'état de pulpe.
Un jeune homme, Elyan Jusset, est toujours en garde vue. On aurait retrouvé chez lui une batte de baseball tachée de sang.
Quelques jours avant les vacances, le jeune homme aurait été frappé et humilié par la victime, devant son lycée: Jean Racine. L'origine de cet incident aurait pour origine l'homosexualité du présumé meurtrier.
Les parents d'Olivier Monsant, absents le jour du meutre, et affligés par le décès de leur fils, en cette période de Noël, n'ont pas souhaité répondre à nos questions.
La famille de monsieur Jusset déclare que celui-ci n'a pas quitté la demeure familiale le soir du meurtre."

Je replie le journal et le tends à Fred.
- Je trouve les détails du meurtre vraiment sordide ! Quel besoin ont-ils de nous décrire avec autant de précision de telles atrocités ?
Philosophe et laconique, Fred me répond :
- Ca fait vendre.
J'acquiesce et finis mon café rapidement. La journée est belle, ma vie l'est tout autant. Que demande le peuple ?
Cependant, tandis que je marche dans les rues, la faim monte en moi. Une faim immorale et malsaine. Un désir qui me noue les tripes.
Je stoppe net, légèrement inquiet. Je n'avais pas ressenti ça depuis plusieurs mois et croyais être sevré. Mais, tandis que les badauds passent autour de moi, mes pensées se déforment, ma vision du monde se modifie. Je ne suis plus un être humain. Je me fais prédateur parmi ses proies.
Et le désir monte en moi, douloureux et jouissif. L'illusion que j'y résisterais alimente le plaisir, la lutte contre cette addiction déjà perdue. Cette soif je ne la connais que trop bien.
La soif de sang, l'envie du meurtre.