Altaïr
| Sujet: Fragment #126 - Halloween 10.04.08 18:36 | |
| Mardi 31 octobre 2006 à Dijon Un manteau de brumes charge le ciel d’une horreur en suspension, blanche et menaçante. C’est Halloween aujourd’hui. Mais je m’en fous. Les enfants zombies sonnent aux portes pour réclamer insolemment quelques friandises à des vieux réactionnaires qui rechignent contre cette fête commerciale « même pas française ». Après une petite heure passée à flâner avec Lola dans les rues du centre ville, à observer les gens, à humer des odeurs de pâtisseries, à savourer la douceur de sa main dans la mienne – regardez, les gens, j’ai une petite amie ! – et à l’embrasser par moment, lorsque l’absence de sa bouche se fait trop pénible, j’ai remonté l’Avenue Victor Hugo en bus pour rendre visite à Maman et goûter avec elle sa tarte au potiron. « Ils ne sont même pas déguisés, soupire Maman en revenant de la porte d’entrée, tu crois que j’ai bien fait de leur donner des bonbons quand même ? » Je hausse les épaules, la bouche pleine de tarte au potiron. « Leur mère était cachée derrière la haie, poursuit-elle d’un air pincé, elle voulait peut-être vérifier que je les ai bien accueilli. » Je finis ma part de tarte, sans rien dire. Je pense à Lola. Tu sais que j’ai une petite amie Maman ? Non, comment pourrais-tu le savoir, je ne t’ai rien dit. Je voudrais t’en parler, mais c’est encore un peu tôt. Pas encore. Il faut que tout soit parfait. « Ton père a des douleurs a la tête depuis quelques jours, me confie Maman en regardant par la fenêtre, le visage presque tragique, comme si elle allait m’annoncer que mon père était atteint d’un cancer du cerveau, alors même que je suis au comble du bonheur. Je suis inquiète. - Il a été voir un médecin ? - Le docteur Cigon, oui, il va lui faire passer des examens à l’hôpital. » Le docteur Cigon est notre médecin de famille et un ami de Papa. Je ne l’ai jamais apprécié, parce qu’il me parlais sans cesse de son fils quand je le consultais, étant petit. « J’espère qu’il n’a rien, dis-je simplement. » Le soir, depuis mon lit, je regarde mon appartement, théâtre infernal des visages d’ombres grimaçantes, de cohortes de ténèbres démoniaque, noires et rouge sang. C’est grâce à toi Papa, et à ton argent, que je jouis de cette liberté, de ce petit chez moi en plein cœur du centre ville de Dijon. Un jour, peut-être, aurai-je le courage de te remercier. | |
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