Antarès
| Sujet: Fragment #17 - Sensations fortes 11.04.08 11:12 | |
| Dimanche 5 novembre 2006 à Dijon Je descends du bus, suivie de près par Dimitri. Aussitôt, profitant de toutes les ouvertures, un froid glacial se répand sous mes vêtements. Après qu'un frisson a parcouru mon corps, je pars en direction de la fête. Je marche, comme à mon habitude, d'un pas rapide et régulier. Dimitri a du mal à tenir l'allure et semble pétrifié par le froid. Il est vrai que je l'ai un peu forcé à venir ici. Mais seule, c'est pas drôle, et j'avais tellement envie de venir. Je crois que c'est le seul endroit où j'arrive vraiment à m'amuser, à oublier le stress du quotidien. Au fur et à mesure que l'on s'approche, les illuminations multicolores, les rythmes endiablés et les odeurs sucrées prennent possession de moi. J'accélère le pas. Maintenant, Dimitri est presque obligé de trottiner. Trop frigorifié pour protester, il se contente de me suivre sans broncher, les mains dans les poches et le visage à moitié caché derrière son écharpe. Nous arrivons à la fête. Mon excitation est à son comble. Mon corps et mon cerveau, stimulés par une déflagration d'ondes sonores et lumineuses, se mettent en quête de quelque chose qui pourra satisfaire le terrible besoin de sensations forte qui me gagne depuis quelque minutes. Guidée par les cris et le vrombissement des moteurs, je ne tarde pas à me retrouver au pied d'une attraction qui répond à mes critères. Il s'agit d' un gigantesque bras, d'une quarantaine de mètres, dont chaque extrémité soutient une nacelle libre en rotation autour de son axe. Je sonde du regard la moindre parcelle de la machine et je continue mon analyse du manège. Le bras est muni en son centre d'un pivot motorisé qui permet de le faire tourner autour de son axe, entraînant les passagers à une vitesse impressionnante. Il faut absolument que je monte là-dedans. « Viens, on y va ! dis-je à Dimitri en le saisissant par la main. - Tu veux pas faire un tour dans la fête avant ? - Non, on fait ça d'abord ! » Je le traîne en direction de la caisse avec détermination. Détermination que ni le froid, ni le prix prohibitif des places ne peuvent entamer. Après quelques minutes passées dans la file d'attente à observer cette merveilleuse machine, c'est enfin notre tour. Je monte les quelques marches qui me séparent de la nacelle avant de m'installer confortablement dans cette dernière. Dimitri s'installe à côté de moi. « T'es folle de m'avoir fait monter la dedans ! Si je tombe dans les pommes, tu me feras du bouche à bouche ! » Je lui souris en guise de réponse. Je suis tellement contente d'être ici que même ses plaisanteries pourries arrivent à me faire rire. Les harnais de sécurités s'abaissent, venant comprimer mon bassin et ne laissant libre de mouvement que mes bras et mes jambes. Je me sens tellement bien. « Déborah... Je me sens pas bien. - Bouuuuh ! T'as peur ! » J'éclate de rire, tandis qu'un homme vient attacher une ceinture de sécurité à mon harnais, sans se préoccuper de mon état euphorique. Quelques secondes plus tard, la nacelle s'élève enfin. La vitesse est surprenante. Très vite, nous passons le sommet, avec une vue imprenable sur Dijon et ses lumières. La machine accélère, mon cœur également. Nous passons près du sol, une brise glaciale fouettant notre visage. A nouveau, vue sur Dijon. La nacelle, emportée par son inertie, se met à tanguer, emportant mon cœur avec elle. C'est vraiment fantastique. Après quelques tours de chauffe, nous avons le droit à une accélération fulgurante. Je suis collée au fond de mon siège. Impossible de bouger. Je sens toute la puissance de la machine qui se transmet à mon corps, mon corps qui accélère, comme mon cœur, et je crie, parce que ça fait du bien, parce que je ne suis plus moi. La brise c'est transformée en tempête, un blizzard qui me lacère la peau à chaque tour, mais peu importe. J'abandonne mon corps à cette machine, je la laisse m'emporter toujours plus vite, toujours plus haut. J'oublie tout. Je n'ai plus de passé, plus d'avenir, je ne pense à rien. Juste à ce que je ressens en ce moment. Une sensation extraordinaire. C'est déjà terminé. Je reprend conscience de l'existence de Dimitri à ma gauche. Il est complètement pétrifié. Je distingue ses yeux clos derrière l'épaisse frange de cheveux blonds qui recouvre son front. On dirait un petit garçon. Je n'avais jamais fait attention jusqu'à ce soir, mais, il est vraiment mignon. | |
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