Altaïr
| Sujet: Fragment #62 - Pardon 20.03.09 3:23 | |
| Jeudi 19 mars 2009 à Dijon « Réfléchissez bien, monsieur Mahogany. Quelqu'un doit avoir des raisons de vous nuire. » Je ressasse les paroles du commissaire Forestier encore et encore. Je voudrais m'endormir et oublier le mouvement du monde, mais malgré moi mon esprit sonde les archives innombrables de ma mémoire, à la recherche d'un souvenir, d'un visage. Je revois le sourire goguenard des amis de Florian, avec qui nous sommes partis en camping durant l'été 2005. Je revois la flamme diabolique qui dansait dans leurs yeux quand ils ont fait chauffer un tison pour me torturer. Un bond dans le temps me propulse quelques années plus tard, dans la fac de médecine. Des étudiants savent que je suis gay et m'insultent au détour des couloirs. Parfois ils nous bombardent, Robin et moi, d'une substance collante. Je prends mon visage entre mes mains, crispe mes doigts sur mon front. Comme si je voulais m'arracher ces souvenirs de la tête. Ils ont fait venir Florian au commissariat de la place Suquet aujourd'hui pour l'interroger. Il fait partie des suspects, tout comme moi, mais je crois que Forestier a compris que nous ne sommes pas coupables. Et à vrai dire, je ne vois pas comment je pourrais continuer à reprocher à Florian ce qui est arrivé. Je sais qu'il n'aimait pas vraiment Robin, et qu'il n'acceptait pas notre relation, mais il n'avait aucune raison de saboter sa propre voiture. Un tordu aurait pu m'envoyer la lettre de menace, puis provoquer l'accident tout en conduisant pour ne pas être soupçonné, quitte à risquer sa vie. Mais voilà, Florian n'est pas quelqu'un de tordu. Borné, buté, têtu, égocentrique, fermé, bloqué, rustre, chiant et insupportable, peut-être, mais il n'est pas tordu.
Lorsqu'il rentre enfin du commissariat, je le suis du regard, gêné, depuis le canapé où je suis avachi. La fenêtre est ouverte et fait parvenir les derniers cris de manifestants qui ont défilé dans la rue toute l'après-midi. Florian ne me parle pas. Il se dirige vers le frigo et en sort une canette de bière, qu'il ouvre et commence à boire en rejetant sa tête en arrière. La cicatrice a métamorphosé son visage. Elle instaure un ordre asymétrique dans un tableau trop parfait, et, jusqu'alors, trop lisse. Mon Dieu, est-ce normal d'aimer autant ces traits, de les désirer comme je les désire ? Je voudrais caresser cette peau et embrasser ce nez et ces lèvres, couvrir ces paupières de baisers. Je voudrais m'enivrer de sa douceur et respirer cette odeur d'homme suave...
Je me dégoute. | |
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Tureïs
| Sujet: Re: Fragment #62 - Pardon 20.03.09 9:25 | |
| Allez Lilian faut aller de l'avant ! | |
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Altaïr
| Sujet: Re: Fragment #62 - Pardon 11.04.09 12:16 | |
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| Sujet: Re: Fragment #62 - Pardon | |
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