Fragment #17 - La Douche

Dans un premier temps, actionner le robinet. Un imprudent glissé dans la douche avec trop de hâte, n’ayant pas pris le soin de laisser venir l’eau chaude au préalable, recevra une averse glaciale en guise de châtiment, et je n’ai nullement envie de réitérer cette désagréable - mais nécessaire - expérience. Puis je me déshabille, j’abandonne ces écailles de tissus pour me revêtir de ma seule intimité, et laisser ma peau épouser l’eau qui pleut du pommeau. Ca dégouline bien chaud, et je relève la tête, comme le font les acteurs au cinéma, en fermant les yeux. Et puis je fait mousser le savon, qui répand sa fragrance dans la cabine en vaporisant ses bulles irisées sur tout mon corps. Enfin, je rince en ouvrant le robinet à nouveau. J’ai du mal à le refermer, tant c’est agréable de sentir l’eau chaude couler sur soi, tant c’est facile de faire taire cette petite voix de ma tête qui me réprimande et me rappelle que, selon des estimations très sérieuses, notre vingt-et-unième siècle connaîtra les guerres de l’eau. En ouvrant la porte de la douche, je répands un nuage de vapeur dans mon temple du sommeil et y déverse une atmosphère de hammam. Ma main attrape une serviette dont j’entoure ma taille, et je sors, des gouttes perlant de mes cheveux et roulant sur mon épiderme. Déambulation dans l’appartement en attendant de sécher. La soude du savon a laissé des taches rouges sur mon torse, et ça gratte… Je laisse couler les minutes, sans rien faire. Puis je revêt mes habits, m’allonge sur le lit et ouvre un livre, n’importe lequel, histoire de s’évader un peu. Une dernière goutte passe sur ma joue.