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 Fragment #229 - Porter sur le monde un regard sans haine

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Altaïr

Altaïr



Fragment #229 - Porter sur le monde un regard sans haine Empty
MessageSujet: Fragment #229 - Porter sur le monde un regard sans haine   Fragment #229 - Porter sur le monde un regard sans haine Empty12.04.08 0:30

Jeudi 24 mai 2007
à Dijon

Je me réveille en pensant à lui. Il a fallu que Ca revienne. C’était inévitable.
Ca.
Je me réveille en pensant à lui, et je me sens bien. La lumière filtre à travers les stores vénitiens et je croirais presque être de retour dans mon temple du sommeil. J’aime cette aube fraîche et douce du printemps. Pour la première fois depuis plusieurs semaines, je me sens bien.
Tu vas le lui dire ?
Quoi ?
Eh bien, tu sais…
Je ne sais pas.
Pourtant, le tribunal du Cœur…
Eh bien quoi ?
J’entends Lilian crier depuis l’entrée :
« Je vais en cours, Julian, à ce soir.
- Ok, je réponds, mais pas assez fort pour être entendu. »
Je me lève paresseusement, me traîne jusqu’à la cuisine, croque un gâteau égaré sur la table que Lilian n’a pas pris soin de débarrasser. Je me dirige vers le frigo en caleçon, l’ouvre en me grattant le torse, inspecte son contenu. Une gorgée de jus d’orange fera l’affaire.
Je mets la cafetière en route, et comme la machine est lente, cela me laisse le temps de passer sous la douche. L’eau coule sur mon corps nu, fraîche et revigorante. Je ferme les yeux, ouvre la bouche, immobile, je laisse les gouttes passer sur mes lèvres. Enroulé dans une serviette, je retourne à la cuisine, boit mon café, m’aperçois que je vais être en retard, accélère un peu.
Passage succinct devant le Miroir. Sourire. Je me sens bien.
L’air du dehors est piquant et agressif, un vent léger qui brûle les yeux et irrite ma peau.
Rue Docteur Chaussier. Place Darcy. Rue de la Liberté. Rue du Bourg. Rue Amiral Roussin.
Me voilà au Dionysos. Une nouvelle journée commence.
Je me sens bien.
Michelle passe aux environs de onze heure. Nous discutons, Louis, elle et moi, de tout et de rien. J’aime ces gens. Il y a quelque chose dans leurs yeux, au fond de leur prunelle. Un truc que je n’arrive pas à identifier, mais qui me transcende. De l’amour tout bleu.
Et je sens que les tensions qui palpitent en moi s’apaisent doucement.
Cette colère et cette haine.

Arthur entreprit un exercice difficile. Désormais il devait chercher le pouvoir du loup en lui sans faire appel à la colère de J. Trouver la force dans son coeur.

Au milieu de l’après-midi, Justin débarque dans le bar. Je n’ai pas répondu à un seul de ses messages, je ne veux plus le voir. Désolé gamin, maintenant il y a Ca. Il se plante devant moi, il a l’air idiot, il devrait comprendre. Je ne sais pas comment le lui expliquer.
« Tu veux boire un verre ? »
Rappelez-vous, moi, je suis le lâche.

En rentrant chez moi ce soir, je me sens bien. Je me fous de Justin, je me fous de tous les gens haïssables. Il n’y a que moi qui compte. Car je suis un dieu, et j’ai tout pouvoir.
L’air s’est rafraîchi, une petite pluie comme celle de la veille serait agréable. Aurai-je le courage de parler à Jed ? Je n’ose même pas y penser. Ses lèvres, ses yeux, son visage. Le garçon-loup. Mon Gémeau.
Rue Amiral Roussin. Rue du Bourg. Rue de la Liberté. Place Darcy. Rue Docteur Chaussier.
Je pousse la porte de l’immeuble. La grosse concierge me fixe sans dire bonjour, son visage antipathique me suit du regard dans les escaliers.
7e étage, je pousse la porte, je me demande si Jed –
Jed est sur le canapé. Avec Lilian. Torse nu peau contre peau je regarde le spectacle infiniment rapide des deux langues qui se délient des corps qui sursautent et des regards soudain posés sur moi.
Jed et Lilian.
Mon petit frère.
Il n’y a plus un bruit dans l’appartement. Je les regarde, immobile.
Puis je m’en vais, je referme la porte de ma chambre, m’étends sur le lit.
Et je m’en fous.
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