Alsciaukat
| Sujet: Fragment #57 - Faux et vrais voyages 12.04.08 20:06 | |
| Mardi 6 mars 2007 à Tours « Et tu nous as même pas envoyé de carte postale ! - Hé hé… je suis vraiment désolé… pas vu le temps passé, pis quand je m’en suis souvenu il était déjà trop tard, la boutique était fermée… » Marie n’écoute pas vraiment, mais Alexandre a un sourire moqueur. Il me fixe, avide, raconter mon séjour au ski, que je crée d’après mes souvenirs de précédents voyages. Je ne sais pas comment il peut croire à ce que je raconte, alors qu’il a pourtant déjà eu quelques aperçus de mon père, qui auraient du suffire à lui faire comprendre que ce dernier n’est plus vraiment du genre à partir. Quant à ma mère, ils ne l’ont bien sûr jamais vue, puisqu’elle est tout le temps en déplacement, comme ils l’ont si bien compris, et il est donc tout aussi illogique qu’elle ait soudain pu se libérer une semaine... Je regarde Marie, qui a l’air ailleurs, le regard par la fenêtre. Elle bouge un peu et prend la main d’Alexandre, qui ne réagit pas et continue de me poser des questions. J’ai parfois l’impression que tout ne tourne pas exactement comme prévu. Pourtant ce genre de surprise est réservé aux faibles, à ceux qui ne savent pas maîtriser leur destin. A mon père. Ma mère. La conversation est interrompue par quelqu’un qui frappe à la porte. Le visage de Marie s’éclaire, et elle se lève pour aller ouvrir. Entrent Jérôme, Jeanne et Georges. Je ne savais pas qu’ils venaient, mais je fais mine d’être heureux de les voir. Je sers la main de Jérôme, qui me dit que j’ai pris des couleurs, puis fais la bise à Jeanne, qui me demande comment je vais sans attendre de réponse. Ce que vous êtes bêtes. Georges me sert la main avec un regard entendu. Je lui renvoie un sourire timide, qu’il balaie d’un regard soudain méprisant. Bon sang, j’en ai marre de ce mec. Il est imperméable à mes mensonges. Je ne sais pas ce qu’il veut. C’est une pièce libre dans mon jeu. Il dit bonjour aux autres sans plus se soucier de moi. Ils sont venus pour faire le devoir libre de mathématiques. Nous nous installons sur la table du salon. J’ai déjà fait le devoir durant la première semaine, mais je le lis de nouveau avec eux. Ils n’ont évidement pas fait grand-chose la semaine passée, trop occupés à oublier leur situation en prépa et la masse de boulot dont ils se plaignent sans cesse en sortant en ville. J’ai pu échapper à ces multiples soirées grâce à mon voyage… Mon téléphone sonne. Je n’ai vraiment aucune idée de qui cela peut être, sachant que quasiment toutes les personnes susceptibles de m’appeler et d’avoir ce numéro sont dans la même pièce que moi. C’est Jérôme, mon père. Je m’excuse auprès des autres. « Jérôme ? - Salut Léo. Arrête de m’appeler Jérôme. - Qu’est-ce que tu veux ? » Je m’attends à tout. Il ne m’appelle jamais. Cela risquerait de briser la routine dans laquelle il s’enferme furieusement. « J’ai des possibilités de voyage sympas avec la boîte, et une collègue m’a proposé qu’on parte ensemble, aux vacances de Pâques, pour les Landes, ça te dirait ? » Je reste interdit. Je ne l’avais vraiment pas vu venir, celle-là. « Je dois vraiment répondre maintenant ? - Euh... non, bien sûr, c’est vrai, j’aurais pu attendre ce soir, mais a priori tu aimerais bien ? - ... Oui, peut-être. - Ok, ça marche, eh bien travaille bien, d’ailleurs tu es pas en cours ? - Non, j’suis en vacances… - D’accord ça marche ! Bonne soirée ! » Il a raccroché. Je rejoins les autres en éludant les questions, continue le devoir en pensant à autre chose. | |
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