Fragment #129 - Le Corps et le Christ

Et si le bonheur n’était qu’une question d’état d’esprit, de réceptivité au monde qui nous entoure ? Et si le bonheur c’était juste ça, savoir prendre le monde comme il est, sans amertume, ni regret ?
Aujourd’hui, il fait beau. Le soleil arpente les rues de Paris, illumine les façades, éblouit les gens et les passants, colore le monde, le fait scintiller d’une myriade de reflets. Je termine de lire « Le Parisien » dont la première page est consacrée aux supporters de l’OM… Triste monde ? Non.
Mon café fume et ma cigarette se consume. J’aspire le poison qui envahit mes poumons, soulagement. Une gorgée du breuvage sacré, le nouveau sang du christ vient charrier dans mes veines la caféine divine. Le café, la cigarette, autant de substances dont le goût contient celui de la mort, petite mais instantanée, cachée dans l’amertume et l’acide.
Courons au suicide et recommandons un petit noir bien serré.
Sortir son Iphone, se connecter à aka-aki et discuter. Autour de moi, dans les environs, plus d’une centaine de pédés connectés, en attente. De quoi ? D’amitié, de sexe, de plan, d’amour… Mon doigt glisse sur la surface de l’écran tactile et zappe, zappe, zappe. Maintenant je peux faire mon marché en pleine rue, en terrasse, au café.
Je me rallume une cigarette et entame la conversation avec Julien. Julien, brun, 21ans, soit disant bien monté, dispo de suite pour plan direct. On bataille, on dialogue, on s’arrange. Julien est actif et se fera un plaisir de m’entraîner dans les joies de la passivité.
Rendez-vous dans une heure, chez lui. Pas de blabla, pas de niaiserie. Désolé Elyan, il ne fallait pas me faire goûter ta pomme, car depuis, je veux essayer, je rêve de tester, de comparer. Je sais que c’est mal, j’aimerais y résister mais je ne l’ai pas vraiment cherché. Je ne réussis pas à m’en empêcher. Ce n’est pas que je t’aime moins, c’est juste que j’ai faim. Pas de culpabilité, cadeau vicié d’une église moribonde et avariée. Ni responsabilité ni trahison, juste la vie qui pulse et pousse, juste le désir d’être encore vivant dans les bras d’un amant.
Une jeune fille me regarde de temps à autre, tout en tapotant sur son Mac. Elle a cet air hautain, ce regard qui dit que je n’aurai rien. Pourtant sous ses airs de demoiselles sûr d’elle, transparaît un besoin, un désir. Mademoiselle pimbêche, au teint de pêche, mademoiselle dédain semble avoir besoin, elle aussi d’un bon coup de rein.