Sirius
| Sujet: Fragment #5 - Loin des yeux, loin du coeur 09.04.08 18:59 | |
| Lundi 4 septembre 2006 à Kanazawa « Lundi ? Pourquoi lundi ? Ca fait une semaine qu’on ne s’est pas vu, sans aucune nouvelle de lui, alors qu’on ne se quitte pas depuis des mois. Mardi dernier, il m’a appelé pour me dire qu’on ne se verra pas avant lundi. Je ne me suis pas inquiétée, en pensant qu’il avait du travail avec la rentrée qui approchait. Quelle idiote ! Il est tellement perturbé en ce moment. Je sais bien qu’il y a quelque chose qui ne va pas. Parfois il est absent, d’un coup son regard se plonge dans le vide et ses yeux s’humidifient… J’insiste auprès de lui pour connaître les raisons de tant de malheur mais il reste muet. Ce matin, comme tirée de mon lit par quelque chose d’incroyable, je me réveille en sursaut à neuf heures. Moi qui me réveille toujours à midi pendant les vacances ! Après, impossible de me rendormir. Peut-être suis-je tellement excitée à l’idée de le revoir aujourd’hui que ma batterie est surchargée ? Je suis à présent comme un robot en surplus d’énergie. L’impatience de le revoir après une semaine sans nouvelles entraîne tous les petits engrenages de mon être tout entier qui, comme mû par un carburant surpuissant, frétille à chaque seconde qui passe et me sépare un peu moins de lui. Je m’assois dans la cuisine en sautant sur la chaise, prête à démarrer cette journée plein gaz ! « Tiens, t’as du courrier. » Ma mère vient de faire son entrée. Elle c’est tout le contraire. Il semblerait qu’elle n’ait pas fait le plein depuis un moment ! Mais, alors que j’ouvre une enveloppe cerclée de bandes blanches, bleues et rouges, un mauvais pressentiment vient stopper net mon entrain si débordant. Je ne connais personne à l’étranger susceptible de m’envoyer du courrier. J’ouvre l’enveloppe lentement, avec autant de précaution qu’on déminerait une bombe à retardement. Je sors la lettre, et commence à lire. Je cale. Et là, impossible de redémarrer. »
« Coucou ma chérie, Comment te sens-tu ? Perturbée j’imagine. Tu te demandes bien d’où peut bien venir cette lettre... Eh bien, du Japon. Je t’en ai déjà parlé il y a longtemps, je t’avais raconté que mon père y avait travaillé longtemps comme commercial, et qu’il y allait encore de temps en temps. Aujourd’hui c’est à notre tour d’y aller. Nous avons attendu de finir notre année scolaire, et avons pris les grandes vacances pour préparer le voyage. Ma sœur, ma mère et moi sommes partis rejoindre mon père ici. Nous sommes à Kanazawa, c’est au centre du Japon environ. Il va falloir que je m’y fasse car dans quelques temps nous entamerons les procédures de nationalisation japonaise…. Oui, maintenant c’est ici que je vais faire ma vie. Je n’ai jamais osé te le dire… J’ai attendu, attendu… Finalement, mardi juste avant que je parte à Paris pour prendre mon avion, je t’ai donné rendez-vous lundi. Oui, car il faut compter 15 heures de vol environ, le temps d’arriver là-bas et de poster la lettre, le temps qu’elle te parvienne, ça faisait lundi. Je le sais car mon père nous a écrit souvent. C’est la meilleure solution que j’ai trouvée… Je n’avais pas le choix, mes parents et ma sœur sont ma seule famille. Mon père m’a proposé un poste dans son entreprise lorsque j’aurais fini mes études. Je retournerai très peu en France. Avec toi c’était vraiment super. Je t’ai aimé comme jamais… J’espère que tu ne m’en voudras pas, et que tu t’en remettras. Bisous, Mathieu. » | |
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