Fragment #84 – Amour chevaleresque

16h15. Fouhh fouhh inh, fouh fouh inh. Je profite d'un rayon de soleil baskets aux pieds. Les nuages jouent avec nous depuis ce matin. Tout le week-end il a fait beau et chaud, hier il à plu sans discontinuer, et aujourd'hui ? Aujourd'hui on ne sait pas trop quel temps il fait. Ce matin pendant mes heures de conduite j'ai dû à plusieurs reprises actionner les essuie-glaces. Et là j'ai chaud.
Fouhh fouhh inh, fouh fouh inh, fou...
D'ailleurs le moniteur dit que je me débrouille de mieux en mieux. Et c'est vrai que je sens que je progresse rapidement dans les “tourner à gauche, tourner à droite”. Je sais aussi faire des démarrages en côte ; j'ai pris également le réflexe un, deux, trois, pour rétro intérieur, rétro extérieur, et angle mort, avant un quelconque déboîtage. Bref je m'en sors bien, et j'en suis content. C'est vrai que j'ai la chance de pouvoir conduire une à deux heures par jour quasi quotidiennement. Je n'aurais donc pas complètement perdu mon année. Et j'en profite, de cette façon dans moins d'un mois je serai prêt à passer le permis.
Fouhh fouhh inh, fouh fouh inh, fou...
Ma belle m'a invité chez elle ce soir. Je voudrais être charmant, je jouerais au prince, je traverserais des forêts sur mon grand équidé clair pour lui plaire. C'est le malheur des temps modernes, on ne peut pas être romantique sans être « too much» . J'ai envie de lui plaire. Je déplacerais des montagnes, j'en ai la force. Elle ne me laisse que jouer avec ses seins sans m'amuser en son sein, et j'ai envie de percer ce mystère. J'ai envie de la percer toute entière.
Fouhh fouhh inh, fouh fouh inh.
J'attends toujours une réponse de Laura. Voilà une semaine que je lui ai écrit. Qu'en a-t-elle pensé ? Quand va-t-elle me répondre ? Habite-t-elle toujours à la même adresse ? Oui, elle avait l'air de s'être posée un peu ; et elle aurait fait suivre son courrier de toute façon. À mois qu'elle se soit brouillée avec son jules.
Fouhh fouhh inh, fouh fouh inh, fou...
Il ne doit pas être en super forme. J'essaierai de le voir jeudi. C'est férié, ils n'ont pas de partiels ce jour là. Pauvre Lilian. Apparemment il n'a pas bien réussi la psycho médicale lundi. Autant dire que ça commençait mal, parce que c'était la première épreuve. Mais je lui fais confiance ; il a énormément révisé. Et il a ça dans le sang, j'ai du mal à imaginer qu'il n'ait pas son année.
Fooouuuuuhhhhhhhhhhh. Réglés parfaitement mes pieds s'arrêtent juste devant chez moi. Mes doigts se portent sur ma montre. 1H28'16''. C'est bien, c'est mieux.
Ruisselant de sueur, j'embrasse ma mère dans la cuisine, j'embrasse mon père devant la télé. Il n'en bouge que pour aller au boulot, c'est déprimant de le voir ainsi. Je ne sais pas quoi faire pour qu'il ait à nouveau envie de faire des choses, mais je ne préfère pas m'approcher de son ennui, j'ai peur que ce soit contagieux. L'eau chaude de la douche ruisselle sur mon corps élancé. J'aime me sentir vide après avoir couru, ça fait un bien fou.
Je monte en carrosse-bus la colline-rue de Mirande, qui me conduit au château-campus, où je retrouve pour une soirée de tendresse ma princesse-bien aimée.