Bellatrix
| Sujet: Fragment #11 - Dans la salle d'attente 27.08.08 15:51 | |
| Vendredi 8 décembre 2006 à Bruxelles Je déteste les médecins ! Je n’ai vraiment pas envie de rentrer dans cette pièce aux odeurs mélangées d’alcool et d’éther. Je regarde du coin de l’œil la porte de sortie. J’envie presque la secrétaire d’être de l’autre côté. Si je pouvais, je m’en irais vite fait. Mais Inès est là quelque part, dans cette même rue, occupée à faire des emplettes. Elle guette, elle me connaît. Pourquoi ai-je eu la mauvaise idée de lui raconter ma mésaventure de l’autre jour ! J’aurais pu m’arrêter au coup de fil avec Terry. Non, il a fallut que je lui parle du tourbillon, de cette douleur dans la poitrine. Et il a surtout fallut qu’elle insiste tellement pour m’amener chez le médecin, que je n’ai pas eu d’autre choix que d’accepter. Si elle est hypocondriaque, ce n’est pas le cas de tout le monde. A moins qu’elle fasse ça égoïstement, de peur que ça s’attrape. J’aurais du prendre un bouquin ou de la musique. Il y a un petit vieux à ma droite, il ne fait que tousser. Ca me gêne. J’ai toujours détesté les espaces confinés et cette proximité avec des gens que je ne connais ni d’Adam ni d’Eve. Et en plus ils sont infestés de microbes. Moi, je suis en bonne santé, je n’ai rien à faire là. Je me résigne. Essayant tant bien que mal de ne pas bougonner intérieurement. Je tente une approche vers la table ou sont entreposés dans tous les sens des magasines. J’en prends un au hasard. De la déco. Pffff. Ce n’est vraiment pas ma tasse de thé. Inès aurait adoré. Bon, va falloir que je me relève, et toutes ces mines blafardes vont encore me regarder. Je m’exécute. Mais cette fois-ci, je prends le temps de bien choisir. On ne m’aura pas deux fois. J’attrape le plus récent Ciné Télé Revue, oui parce la plus part de ces magasines ne sont pas de première fraîcheur, c’est celui qui date d’il y a deux semaines. Je feuillette tranquillement les pages. Il y a un article qui parle du manque de dignité humaine dans le centre fermé pour « sans papiers » de Vottem. Le personnel soignant est là à mi temps et ce sont les gardiens qui doivent distribuer les médicaments. Je lis « si un « résident » a une rage de dent, il s’inscrit chez le médecin et cela peut durer un mois pour qu’il voie un dentiste. » C’est triste, vraiment. Ces gens viennent chercher l’asile chez nous bien souvent parce que la situation est invivable chez eux, et voilà comment on les traite, pire que des chiens. A la recherche de quelque chose de plus joyeux, direction la rubrique potin avec la publication du livre d’O.J. Simpson… « Mademoiselle Angela Sélim » Ha, enfin, c’est mon tour ! J’entre dans la pièce de tous les supplices, d’où on ne ressort qu’avec de mauvaises nouvelles. « Bonjour Angela, cela fait longtemps, ça me fait plaisir de te voir, non que je sois ravi que tu aies quelque chose (rires), rien de grave j’espère ? Comment vont tes parents ? » Le vieux médecin de famille, aux cheveux poivre sel, frôlant les soixante-cinq ans, Docteur Mercier, il ne vieillit pas, en fait il a toujours été vieux, même quand il était mon pédiatre. « Alors ma grande, qu’est ce qui t’amène ? » Je lui explique vite fait, sans oublier de mentionner qu’après le tourbillon, ça m’est encore arrivé deux fois, ça j’ai bien évidemment omis de le dire à Inès. Il ne sait pas trop ce que j’ai. Il pense que c’est du surmenage. Et il me pose un tas de questions sur mon hygiène de vie et ma gestion du stress au quotidien. « De la névralgie vous avez dit ? Qu’est ce que c’est ? - Hé bien c’est ce que tu me décris, mais ce n’est ni le cœur ni les poumons, c’est intercostal ! » Suite à mon air dubitatif, il m’explique que mes douleurs se passent entre mes côtes. Ha oui, intercostal, oui. « Et que dois-je faire au juste pour que ça ne revienne plus ? - Te reposer Angela ! Te reposer ! Tes parents m’ont dit que tu te lançais très sérieusement dans une carrière artistique, dont ils sont fiers au demeurant, mais que ça te prenait énormément de temps, avec ton autre travail. Donc, je te ferai un certificat médical a dater de demain pour une semaine. Ca te fera le plus grand bien. Et avec ça, des gélules contre l’anxiété. - Merci Docteur Mercier. » Je quitte la pièce, enfermant dans ma main ce précieux petit bout de papier qui va me permettre de me détendre pendant une longue semaine. Mais aussi de faire la fête ! Et je repense à cette phrase… j’étais loin de me douter que mes parents étaient si fiers de moi… | |
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