Fragment #14 - Black Urbs

Chling chling. Les bruitages du bouffon et de ses grelots me filent mal au crâne. Il doit y avoir un chemin en dehors d'ici, dit le fou. Le serpent est dans l'arène, il remonte la colonne vertébrale. Le serpent de sable sonne la ligne noire. Il frotte sur le revêtement des fûts et laisse le temps s'écouler. Je me souviens du sable qu'on égraine entre les phalanges des doigts. L'épaisseur de la sueur au front, et les plantes cactus s'érigeant au ciel et bleu et noir. Voilà ce qu'il reste de la fugue du dimanche soir. J'ai encore fugué en essayant une énième dose préparée par Charly. Echec. Je ne suis pas mat, tant que je ne perdrais pas le dernier boulon qui pendouille à la tempe. Il faut vraiment que j'arrête.
On reprend ; la situation : la quête épique ? Ca va, c'est pas si catastrophique que ça. La situation au quotidien ? Au mag' ça va, à la maison ça va, le midi ça va, la télé ça va, la radio, ma platine vinyle squattée par un Tricky abrasif, ça va. Et Catch Hell Blues ? ça va. Le revêtement au sol tient encore la route, et la route n'est pas si mauvaise que ça.
« Et toi, ça va ?
- Oui.
- Et ton mal au rein ?
- Ca va mieux.
- Tu baises ? »
*beep*
Passons à autre chose ! Il est 14h37 à la pendule de mon bureau et ce week-end, je revenais de quinze jours de vacances méritées. Les vacances ? A part un début dans le sud au goût de June in Red, R.A.S - au repos - déconnecté.
Et là, je suis de retour au Kremlin. A mon siège, farfouillant quelques papiers, gambergeant devant deux trois annonces de concert, un peu fébrile. Des heures passent, avant le début de soirée. 18h25.
Et là, je suis de retour à Paris. Dans la rue, oui je me sens mieux. Et ce désordre urbain et les pulsations qui l'animent. La ville agit sur mes humeurs -L'Urbs et la Civitas. Elle a toujours eu un effet sur moi et, semble-t-il, d'intensité variable selon le contexte ou la période de ma vie. L'été, l'après-midi est brûlant et rend son emprise tiraillante. Je ressens affluer à la fourche à ma tempe le sang. Sous pression en vagues incessantes de foules des visages des trajets les goudrons. L'Urbs est l'espace l'ordre et le désordre, l'hébergement, le route et le lieu. Verre & béton & poussière. La Civitas est la vie la communauté les sans-visages, aux vibrations humaines. La cité a une empreinte unique qui s'immisce sur et sous ma peau. Traçant des lézardes à fleur de peau sur mes avant bras à mesure que je me laisse pénétrer par les tensions urbaines. J'ai appris, j'ai compris. Charly m'avait dit : « Les hallucinations ne se puisent pas dans la droguerie du coin, tu comprends ? L'essence est ce et ce pourquoi la vie s'agglutine ».
Je les cherche, ces amas. Comme je cherche ces étoiles, elles brillent à l'encre et pulsent la vie. J'ai toujours eu cette sensation d'être sous perfusion virtuelle. Et l'été, je sens mes poumons investis de cette énergie-poison qui me pervertit. Mon démon est, mon démon nait. My Evil is strong. Je vois une rue, une rue noire. Une femme sensuelle, la foule pulse l'estomac -une chaleur oppressante. J'ai envie d'une femme. Rue et mauve et poussière.
Je fouille mon répertoire rapidement, fais défiler les numéros. J’en retrouve un.
06.24.86.59.45 - Stella