Fragment #441 – Noces de Rubis

Maman est venue me voir. Elle a échappé à ses Noces de Rubis, au traditionnel rassemblement familial. Papa et mes frères ont fini par lui dire la vérité. Elle me regarde en pleurant, elle vient ici déverser des larmes sans rien dire, elle vient me faire culpabiliser de n'être pas comme les autres. Elle n'est pas vraiment triste pour moi, elle est triste pour elle. Elle ne se dit pas « mon pauvre Julian », elle se dit « qu'est-ce que j'ai fait au bon Dieu pour mériter ça ».
Elle s'est faite belle pour venir chez les fous. Elle regarde partout, elle a peur d'être salie. Elle ne veut pas pleurer pour eux, surtout pas, qu'ils ne l'approchent pas. Elle vient car elle ne peut pas y croire, je ne peux pas être comme ça. Il faut bien que quelqu'un vienne réaliser que ça n'est pas possible, et me ramène à la maison.
Mais non, Maman. Non. Je suis bel et bien cinglé, à cause de ta mère, en plus. La folie a sauté une étape, et tu es cette heureuse étape. Mais tu as transmis un sang vicié, et le voilà qui fait son œuvre, à présent. Je suis schizophrène.
Tu sais, comme dans les films. D'ailleurs, regarde moi, je ne sais pas quoi dire. Même si je savais, je ne parlerais pas. Les cachets m'anesthésient et je n'ai pas la force d'ouvrir la bouche.
Maya, dans ma tête, est endormie. Les médecins espèrent ainsi la dissiper peu à peu.
Quelle drôle d'idée.