Fragment #4 - Le jour du Soleil

Qu'est-ce qu'il fout là, ce putain de soleil ? On est en hiver, merde, alors cette connerie de soleil inutile, non merci, on s'en passera. De toute façon, vu le froid qui règne dehors, le soleil et le ciel bleu, c'est juste un vernis, pour faire joli.
Je regarde ce bleu pâle à travers le velux, allongée sur mon lit. Aujourd'hui, je ne veux penser à rien. Je veux juste rester là, sans rien faire, à attendre que le temps passe. Je hais les dimanches, même à Paris où leur pouvoir méphitique est atténué par le mouvement sans fin de la capitale. Le souvenir de toutes ces heures dominicales, passées à Dijon, emprisonnée dans l'ennui, reste gravé dans la consonance fade et grasse de ce mot, « dimanche », qui vient me hanter à chaque fin de semaine. En fait, je crois que je si je hais autant ce jour, c'est parce qu'il précède l'ennemi public hebdomadaire numéro deux : le lundi. Synonyme de reprise du travail, de débuts de semaine pluvieux, maussades, gris, froids, ce lundi qui annonce que tout reste encore à faire, alors que le vendredi, au contraire, est annonciateur de repos et d'un sentiment d'accomplissement.
Les minutes et les heures passent peu à peu. J'en oublie de me lever pour manger. Ce n'est pas que je n'ai pas faim -au contraire, mon ventre hurle famine-, mais je n'ai pas le courage de porter mon corps jusqu'à la cuisine, pas le courage de constater que je n'ai pas fait les courses, pas le courage de préparer des pâtes et un vulgaire steack haché pour me couper l'appétit.
Une vague de nausée m'envahit. L'image d'un steack haché me fait penser à Julian.
Peut-on vivre avec une telle culpabilité ?