Jeudi 26 mars 2008
à Paris
3h07. Derrière moi la chaleur de ma couette, celle d'un café fraîchement coulé, et enfin celle d'une douche revigorante. J'accompagne la porte pour qu'elle ne claque pas. Devant moi la nuit, le froid, et le ciel rouge parisien. Je hisse mon gros sac sur mon épaule droite et enfonce profondément mes mains dans mes poches de manteau. Il n'y a pas de métro à cette heure-ci, et comme je n'ai pas de voiture ici, je suis obligé de faire le trajet de chez moi à la caserne à pied. Théoriquement j'en ai pour plus d'une heure, mais en marchant vite, ça se fait en à peine trois quarts d'heure. Marcher vite ça me réchauffera. De toute manière, vu l'heure qu'il est je n'ai pas le choix.
Selon les rues, il y a plus ou moins de voitures, mais Paris ne dort pas. Paris ne meurt pas la nuit pour se réveiller au matin, non ; Paris est la putain de tous ce noctambules qui déambulent, elle passe la nuit avec eux, ils aiment ce temps la nuit dans ses bras, la partagent volontiers et font de nouvelles rencontres. Paris ne dort jamais, ne ploie sous le joug d'aucun amant, résiste aux à-coups de la jeunesse, vit, vit pleinement et simplement. Paris et sa pollution respirent de vie. Paris, ville lumière illumine le ciel quand le ciel n'illumine pas Paris. Je ne sais pas si vous l'avez déjà remarqué, mais à paris, les nuits sont rouges. Rouge baiser, rouge passion, rouge endiablé. Rouge comme le sang qui coule dans les veines des danseurs, comme les robes des danseuses, comme la sangria sur les plateaux des serveurs. Rouge comme ce feux tricolore aussi. Je me dépêche de traverser avant qu'il ne repasse au vert. La rue de Rivoli ne voit guère la différence entre le jour et la nuit, il y a quasiment autant de circulation. Je ne suis plus loin des halles, tous les fumeurs sont dehors. Les discussions vont bon train, personne ne se soucie de ne pas parler fort à cause des voisins qui dorment. Savent-ils au moins qu'il fait nuit. C'est enivrant de voir ces gens dehors un mercredi soir, ou plutôt un jeudi matin, comme si de rien était. C'est la fête partout, c'est la fête tout le temps.
Bientôt les bars fermeront, les boîtes suivront, les métro circuleront, les magasins ouvriront, et moi je serai en train de travailler depuis plusieurs heures déjà. Des collègues viendront, ici ou ailleurs, ramasser un jeune, ou moins jeune, qui a trop abusé de l'alcool. Pourquoi pas de la sangria d'ailleurs.
Je traverse la Seine, toujours d'un bon pas. C'est vraiment joli. Pont au change, lumière sur la Seine. Pont Saint-Michel, lumière sur la Seine.
Et enfin la rue du Vieux Colombier. Je croise un VSAV au moment ou je passe sous le porche ; Marina me fait signe de la main par la vitre arrière. Je lui réponds de la même façon.
C'est sûr, Paris ne dort jamais ; mais les parisiens dorment-ils seulement ?