Shedar
| Sujet: Fragment #30 - Les nouveaux autres 11.04.08 12:35 | |
| Mercredi 10 octobre 2007 à Dijon Prendre du recul. Là, chacun visualise un clone partiel de soi sur la scène d’un presque théâtre, presque symétrique. Photographie d’un faux instant. Presque parce que chacun de ces clones, dorénavant statique, a pioché sa position dans une autre boîte de Pandore, d’hyperliberté, qui asphyxie la réalité. Honorable tentative. C’est ainsi que chacun s’observe et s’épie d’une oreille, abandonnant l’autre, la laissant s’endormir loin du monde des lois physiques, sous le discours d’un esprit trop perturbé par ce que les autres oublieront tellement vite. Vivre à reculons. Prendre du recul pour prendre la température, savoir ou croire savoir ce que chacun des autres peut penser de soi. Une équation au nombre d’inconnues inconnu. Des solutions à perte de vue. Un problème. Ce problème, j’y ai beaucoup pensé pendant l’été. Car je la vois comme un problème cette rentrée universitaire. Seulement l’été a été trop court pour étudier toutes les possibilités. Je crois que les meilleurs problème qu’on puisse avoir sont ceux qui n’ont pas de solution. Finalement l’IUT a bien voulu de moi, je quitte prématurément la fac pour un autre bâtiment, cinquante ou cent mètres plus loin, où je prends des cours de masse en amphi quasi-similaires, avec des gens quasi-similaires. J’étais étudiant là-bas, je suis étudiant ici. C’est une autre vie, quasi-similaire. Excepté que les nouveaux autres, les autres d’ici, ont déjà leurs habitudes. Leur mascotte. Des regards et des regards et quelques bonjours ironiques. Parce que je suis le dernier de la promo, et que celui qui a échoué à ma place, bien que parti depuis déjà presque une semaine, est celui dont ces nouveaux autres parlent le plus, et à cet instant encore leur unique raison de me parler. Ce n’est pas ce qui m’inquiète. Ce qui m’inquiète, c’est qu’ils ne semblent pas se lasser de me comparer à ce garçon, que je n’ai jamais vu, que je ne verrai peut-être jamais. Parmi les multiples possibilités non étudiées se trouve ce décalage temporel. Plus simple à prononcer qu’à supporter. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Je suis entré ce matin dans cet amphithéâtre deux semaines après ces nouveaux autres et je regrette déjà les anciens. | |
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