Shedar
| Sujet: Fragment #42 - Miroir ô miroir 11.04.08 12:54 | |
| Vendredi 4 janvier 2008 à Dijon Rester concentré, rapide, et limiter la casse. En théorie j’ai bien compris. Ensuite on verra. C’est mon premier jour au Dionysos. Il est encore tôt, alors en attendant la foule je tente de me familiariser rapidement avec les recoins des lieux, les détails des objets, créer des habitudes, des réflexes, des automatismes, apprendre les menus, les noms d’alcools et les verres qui vont avec, en somme le vocabulaire du métier. Non. En somme, apprendre le métier. J’imite Lullaby, me laisse guider par Louis. Mon plateau tremble encore. Je cherche à chaque instant un clin d’oeil ou de coin de bouche pour m’assurer que je ne suis pas en train de commettre l’erreur, la seule, l’unique, celle qui mettrait en péril l’avenir du bar et par la même catastrophe la vie de Louis. Pourtant rien n’est si compliqué pour l’instant. Servir un verre à un client matinal. Nettoyer une table pour le suivant. Ainsi vont les heures du serveur que je suis désormais à plein temps en attendant la reprise des cours de biologies de toutes les sortes. J’ai repromis à Louis que même après les cours je viendrai. Michelle m’a recommandé de m’organiser habilement parce qu’être efficace en cours et au Dionysos sera fatigant. Elle doit sûrement avoir raison, comme d’habitude, mais je suis encore un peu loin de l’admettre. Soudain Louis me prend le plateau des mains pour y déposer un pot de gel et un peigne : « Tiens, pour la chemise ça va, par contre faut vraiment que tu fasses quelque chose à tes cheveux. - Tout de suite ? - Oh oui !.. Immédiatement ! me lance-t-il en riant. » Il a le même sourire que Michelle. Je file aux toilettes et m’installe devant le miroir. Je verse un peu d’eau sur mes cheveux et commence à la rabattre en arrière. Quelle horreur... J’ouvre le pot. C’est le début d’une minutieuse analyse de la mixture que je vais pour la première fois déposer dans mes cheveux. Cela ne doit pas être si difficile, plein de garçons le font... J’en prends un peu, l’étale sur mes doigts. Beurk. Bon, allez. Un. Deux. Trois. C’est parti. Je me tartine le crâne à pleines mains, du front à la nuque. Puis encore. Et encore... Bon ça devrait aller là hein. Je me redresse. Non ce n’est pas moi... Bonjour qui êtes-vous, ou plutôt qui suis-je... Miroir ô miroir, dis moi au moins que ce sacrifice n’est pas vain... | |
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