Jeudi 11 mars 2010
à Kouandé, Bénin
7h16. Je déjeune tranquillement dans la case de la famille qui m’héberge. Je suis arrivé hier soir. Quand on m’avait dit que le village était à quatre cents kilomètres de l’aéroport, je m’étais dit qu’on ferait le voyage depuis Paris dans la journée. Pas du tout. En descendant de l’avion, un responsable de l’association m’attendait. On a passé la nuit à Cotonou, en attendant que l’avion d’Eva atterrisse. Eva arrive sur le chantier en même temps que moi. Nous allons remplacer deux autres personnes. Ensuite nous avons fait du bus, du la mobylette, passé la nuit dans un village, reparti à pied, croisé une piste, pris un taxi brousse. Après deux jours de trajet pour faire si peu de kilomètres nous sommes enfin arrivés - cassés par les à-coups dans les pistes défoncées- au village de Kouandé. Je suis bien content de ne pas trop m’être chargé. Un sac suffisait largement pour voyager.
Je fais connaissance avec cette famille. Il y a Emile le père, Maïjan la grand-mère, Elyre l’autre grand-mère, Neline la mère, et les enfants Baptiste, Jena et « Bébé », le bébé. Le soleil est encore bas à l’horizon, mais ses rayons entrent déjà dans la case et viennent me chatouiller la plante des pieds. Je bois une sorte de thé au café. Il y a de l’eau chaude c’est sûr, mais je suis incapable de dire ce qui a infusé dedans. Nous sommes assis en tailleur sur le sol, on se croirait dans l’un de ces reportages de la cinquième chaine dans lequel on découvre des pays étrangers. Je suis dans le reportage, il n’y a que moi, même pas de caméra.
Bertrand vient frapper, -je ne sais pas si on peu dire ça étant donné qu’il n’y a pas de porte – c’est l’heure d’y aller. On nous a déjà montré le puits hier. Bertrand c’est le responsable de l’association sur place, c’est lui qui dirige les opérations.
« Bonjour Alex, bien dormi ?
- Oh que oui. C’est agréable de se réveiller dans un tel décor.
- Et tu verras, ce n’est que le début, on y prend vite goût. On va commencer dès aujourd’hui car samedi Jonathan, celui que tu remplaces, va repartir, et je voudrais qu’il ait le temps de t’expliquer deux trois trucs.
- Ok.
- Tiens il est là-bas. Va le voir, je vais chercher Eva. »
Je traverse la place du village en direction du groupe de personne indiqué par Bertrand. Ils écartent leur cercle en me voyant arriver, je leur sers la main un à un.
« Bonjour, c’est toi qui va remplacer Jon’ ?
- Oui.
- Toi aussi tu es français.
- Oui.
- C’est bien ce que vous faîtes.
- Merci. »
Jonathan souffle une dernière fois en l’air, crache par terre, écrase son mégot contre l’arbre et le met dans sa poche.
Comme il voit mon regard étonné il lance en m’emmenant près du puits : « Oui, ici, on ne jette rien par terre. Le sol n’est pas une poubelle.» Et il ajoute, « C’est Mokaté qui t’a parlé, le chef du village ; prend garde à lui, il n’aime pas trop que des étrangers trainent dans le village, même si il est bien content de savoir qu’il y aura bientôt de l’eau ici. »