Fragment #9 - La nouvelle vie

Je suis aux beaux Arts. Juliette me fait face, comme d’habitude. On n’arrête pas d’échanger des regards complices. Je lui ai raconté mon weekend riche en émotions et mon coming-out plus ou moins forcé. J’ai beau être avec Elliott, j’ai du mal à me faire à l’idée que maintenant, je suis gay. Je ne sais pas comment ça va se passer.
Plus j’y repense, et plus je me rends compte que le cauchemar de la semaine dernière m’a aidé. Celui où Emilie avait le rôle de la reine mauve et Juliette, celui de la reine verte. Peut être était-ce un appel à l’aide de mon inconscient pour m’aider à me questionner sur ma sexualité ? Possible.
Si je pouvais serrer dans mes bras mon inconscient, je le ferais sans hésiter. Grâce à lui, je me sens beaucoup mieux et j’ai sais quelle sera l’œuvre présentée pour mon sujet : le « je profond ».
Seul Mathieu continue à me faire soucis. Toujours à dix mètres de moi en cours, toujours à m’épier et à me dessiner. Maintenant que j’ai viré de bord, je n’ose pas lui parler, de peur qu’il décèle en moi ce changement. On dit que les gays se repèrent entre eux très rapidement dans la rue, sans pour autant se connaître. J’espère que Mathieu n’est pas de ceux-là.
Je surprends Juliette me faire un clin d’œil et poser son regard sur Mathieu. Je pense trop fort, elle a encore tout compris.

18h. Je rentre chez moi. J’ai hâte de parler à Elliott sur msn ou facebook. Par contre Hanna me fait peur. Je suis parti avec la voiture hier, en la laissant à Ravilloles. Je ne sais pas comment elle est rentrée, ni comment mes parents ont pris la situation. J’appréhende surtout le déroulement de ma soirée, en sa compagnie .
Arrivé dans ma chambre, mes affaires sont toutes rangées dans des cartons, accompagnés d’un mot d’Hanna :

Comment a-t-elle osé mêler Victor dans tout ça ? Elle n’a vraiment aucun cœur. Si je n’étais pas son frère, je lui aurais mis une claque depuis longtemps.
Je ne sais pas comment prendre ces nouvelles. Je suis heureux de retrouver Isabelle. Je sais que ça va bien se passer avec elle. Par contre je vérifierais auprès d’elle les propos d’Hanna. Je ne sais pas si elle a voulu me faire du mal ou si elle disait la vérité.
Je charge la voiture avec mes affaires et m’en vais chez Isabelle, à quarante-cinq minutes de route du centre de Lyon, dans la plaine de l’Ain.
La paix intérieur que le weekend m’a donné a été remplacée par de l’inquiétude. Couper les ponts avec Hanna sera quelque chose de très facile à faire mais avec les parents, c’est autre chose.