Procyon
| Sujet: Fragment #20 - Un mal pour un bien 12.04.08 1:13 | |
| Lundi 27 novembre 2006 à Dijon Aujourd’hui je vois du monde. Je sors de mon trou, j’oublie ces infamies et me remets à vivre. Il est 7h39 et j’arrive à Montchapet. Je passe entre les deux battants de la grille lorsque tout à coup, je vibre. Qui cela peut-il bien être ? Lilian. Que me veut-il ? Un clic plus tard et je suis au courant. Je suis malade, peux-tu me prendre les cours stp ? merci. Alors aussitôt je réponds dans un langage sms que bien sûr, et que je les lui apporterai en sortant. J’arrive dans le couloir, on me dit « bonjour comment ça va ? », comme à chaque personne que l’on rencontre, même si l’on se fout royalement de la réponse. Je vais bien, et me plais à le dire. A dix heures tout rond, j’ai cours avec Mlle Pernois. Le perversité à l’état pur. Rien n’y fait je ne réagirai pas. Et puis qu’elle continue à étudier l’homme, puisque sur cette Terre, il n’existe de femmes que les filles de Satan, et les rêveries de promeneurs solitaires. Tout se déroule à merveille. La seule différence avec un jour normal c’est ce vide sur la chaise voisine. J’irai le voir ce soir, il sera content que quelqu’un pense à lui. Midi sonne à la même heure qu’habituellement, et le fabuleux ballet des cartes magnétiques se rejoue : comme tous les jours. J’ai même du monde à ma table. On parle de tout et de rien, surtout de rien. Comme ils sortent par derrière je les suis et m’autorise une cigarette. Bah oui ma petite clope d’après repas elle commençait à me manquer, ce n’est peut-être pas si mal qu’elle soit partie. Que c’est beau d’être libre. Lorsque tout suit son cours habituel, le temps passe plus vite. La journée solaire arrive à son terme alors que le tintement de la sonnerie annonce la fin des cours. Il est 17h00. Je sors ; mon manteau sous le bras pour l’enfiler dans le couloir et me dépêcher d’arriver chez Lilian. Arrivé devant la grande bâtisse en haut de l’avenue Victor Hugo, un instant d’hésitation. Je souris à nouveau, pour y croire, et sonne. La porte s’ouvre sur une femme. La quarantaine passée, plutôt belle et distinguée : sa mère. Tu dois être Alexandre. Monte, il est dans sa chambre. Alors je gravis les marches comme si j’étais déjà venu des centaines de fois. Plus de bruit. J’entrouvre la porte. Arrête de respirer. Il est étendue sur son lit. Je ne veux pas le déranger. Alors j’entre et le regarde dormir, le peu de lumière qui filtre à travers les rideaux me permet de voir son dos nu, la couverture au dessus des reins. je suis touché par la beauté de ses formes. Quelques minutes seulement s’écoulent dans la pénombre, avant qu’il n’ouvre les yeux. T’es là depuis longtemps ? Non. Ca va ? C’est moi qui aurait dû poser cette question là. Mais je n’ai pas le temps d’y réfléchir plus que ça. Des larmes se mettent à couler sur mes joues chaudes. La carapace de toute la journée vient de tomber, il n’y a plus de fortification. Un sanglot remonte dans ma gorge et semble m’empêcher de respirer. Observant le champ de ruine qui subsiste, il me prend dans ses bras ; je sens la chaleur de son torse humide sur mon front : c’est agréable, de sentir qu’on nous comprend. C’est un homme, c’est normal qu’il me comprenne. J’ai bien fait de venir. | |
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